
Un rattrapage face à une guerre médiatique déjà perdue
Depuis plusieurs années, Israël est à la peine dans la guerre des images et des récits. Face à une déferlante de contenus biaisés, simplifiés ou manipulés, largement diffusés sur les réseaux sociaux par des acteurs souvent mieux organisés et plus nombreux, l’État hébreu a vu son image se détériorer, notamment auprès des jeunes générations en Occident.
L’absence d’une stratégie de communication unifiée, le manque d’outils adaptés aux codes numériques contemporains, et une posture souvent défensive ont laissé le champ libre à ses détracteurs.
Dans ce contexte, l’initiative TEEN SPIRIT se présente comme une réponse intelligente et audacieuse.
En confiant à sa jeunesse le rôle d’ambassadeur digital, Israël renoue non seulement avec l’innovation, mais transforme une faiblesse en force : celle de raconter lui-même son histoire, avec authenticité, émotion et créativité, dans le langage du XXIe siècle.
Un projet qui ne gagnera peut-être pas la guerre de l’information du jour au lendemain, mais qui marque un tournant décisif dans la reconquête des esprits.
Minecraft au service du plaidoyer numérique : l’initiative israélienne TEEN SPIRIT
Dans un contexte où l’image d’Israël est souvent contestée sur la scène internationale, une initiative novatrice mobilise la jeunesse pour redéfinir la narration nationale.
Le programme TEEN SPIRIT, orchestré par le Quartier général de l’information civile en partenariat avec le ministère de l’Éducation, forme des adolescents à devenir des ambassadeurs numériques de l’État hébreu. Parmi les outils utilisés, le jeu vidéo Minecraft se révèle être une plateforme pédagogique et diplomatique inattendue.
Une formation à la croisée du numérique et du civisme
TEEN SPIRIT propose à plus de 500 jeunes, répartis de Dimona à Kfar Vradim, une formation de 32 heures axée sur des compétences variées : intelligence artificielle, recherche de données, expression orale devant la caméra et stratégie de communication. Cette initiative s’inscrit dans une démarche de recherche académique menée par l’Ono Academic College, visant à évaluer l’impact de l’engagement civique numérique chez les adolescents.
Minecraft : un outil de diplomatie publique
À Hod Hasharon, un groupe d’adolescents a transformé Minecraft en un espace virtuel dédié à la découverte d’Israël. Les joueurs du monde entier peuvent y explorer des répliques numériques de sites emblématiques tels que le Mur occidental ou les tours Azrieli, tout en s’immergeant dans des récits d’innovation et d’héroïsme israéliens.
“Notre projet vise à faire découvrir au monde les différentes facettes d’Israël – celles dont on ne parle pas dans les médias et sur les réseaux sociaux”, explique Amit Arbiv, 17 ans.
Cette approche ludique et interactive permet de renforcer le lien émotionnel entre les jeunes internautes et la culture israélienne, en contournant les canaux traditionnels de communication.
Une mission civique portée par la jeunesse
Eliav Batito, chef du Quartier général de l’information civile, souligne l’importance de cette démarche :
“Ce n’est pas seulement de la propagande, c’est une mission civique et éthique qui vient d’en bas.”
Les participants, âgés de 14 à 17 ans, développent des projets variés : pages Instagram, podcasts, applications, campagnes multilingues et vidéos générées par intelligence artificielle. Ces initiatives seront présentées lors d’une conférence nationale à Jérusalem le 6 mai, en présence du président de l’État, marquant la clôture du premier cycle du programme.
Vers une diplomatie publique 2.0
Au-delà de la technologie, TEEN SPIRIT incarne une stratégie nationale visant à créer une infrastructure humaine pour la sensibilisation internationale. Les diplômés du programme intègrent une communauté active, participent à des missions à l’étranger et sont exposés aux domaines de l’entrepreneuriat, de la diplomatie publique et de l’innovation.
Cette initiative témoigne de la volonté d’Israël de renouveler sa communication internationale en s’appuyant sur la créativité et l’engagement de sa jeunesse, transformant ainsi des outils ludiques en vecteurs de diplomatie moderne.
Qu’est-ce que Minecraft et comment ça fonctionne concrètement ?
Un monde en blocs à modeler sans limite
Minecraft est un jeu vidéo de type “bac à sable”, dans lequel les joueurs évoluent dans un univers entièrement composé de blocs cubiques en 3D. Chaque bloc représente une matière (terre, pierre, eau, bois, etc.) que l’on peut détruire, collecter et assembler pour créer tout ce que l’imagination permet : maisons, monuments historiques, machines, villes entières.
Deux modes de jeu, deux expériences complémentaires
-
Mode Survie : les joueurs doivent récolter des ressources, construire des abris, fabriquer des outils, et se défendre contre des créatures hostiles. C’est une immersion complète dans un monde vivant et évolutif.
-
Mode Créatif : toutes les ressources sont disponibles en illimité. Les joueurs peuvent voler, construire librement, et se concentrer exclusivement sur l’inventivité, sans contrainte de survie.
Un outil d’apprentissage et de transmission
Minecraft est bien plus qu’un jeu : c’est un outil éducatif puissant. Grâce à ses mécanismes simples et intuitifs, il permet :
-
la reconstitution historique de lieux emblématiques (comme les sites israéliens dans le projet TEEN SPIRIT),
-
l’apprentissage de la programmation grâce aux blocs de commande,
-
la création de circuits logiques et d’objets interactifs via la “redstone”, équivalent d’un système électrique simplifié.
Un serveur Minecraft pour Israël
Dans le cadre du programme TEEN SPIRIT, des adolescents israéliens ont conçu un serveur Minecraft international. Les jeunes du monde entier peuvent s’y connecter pour visiter des reproductions interactives du Mur occidental, des tours Azrieli ou encore découvrir les valeurs, les innovations et l’héroïsme du peuple israélien – dans un format immersif, engageant et adapté à leur génération.
Comment un jeu peut-il influencer les opinions des détracteurs d’Israël ?
On ne convainc pas par des discours, mais par l’expérience
Les détracteurs ne lisent pas de tribunes pro-israéliennes. En revanche, ils jouent, parfois des heures par jour, sur des plateformes comme Minecraft. L’idée n’est pas de leur faire changer d’avis par un argumentaire frontal, mais de les immerger dans une expérience qui contourne leurs préjugés :
visiter Jérusalem, le Mur, la Mer Morte, les startups ou Yad Vashem… dans un jeu, sans pression politique.
Changer la perception émotionnelle
En recréant l’histoire, les sites, les récits israéliens dans un environnement non menaçant et familier comme un jeu vidéo, on agit sur l’affect et non sur le débat idéologique.
Un joueur peut, sans même s’en rendre compte, ressentir de l’attachement, de la curiosité ou de l’admiration pour ce qu’il découvre virtuellement.
On ne dit pas “voici pourquoi tu as tort”, on montre ce que les autres ignorent ou n’ont jamais eu accès.
Accéder à des publics inaccessibles autrement
Les plateformes comme Minecraft, Instagram, TikTok ou Discord sont aujourd’hui les vrais lieux de formation de l’opinion chez les jeunes.
Les détracteurs d’Israël s’y trouvent, parfois sans hostilité profonde, mais avec une vision biaisée.
En entrant dans leurs espaces numériques avec du contenu interactif, narratif, attractif — et non institutionnel — on crée une brèche dans le mur de désinformation.
Créer des ambassadeurs “naturels”
Un jeune non-israélien qui a vécu une expérience positive dans un monde Minecraft israélien peut devenir un relais : il en parle à ses amis, partage des captures, écrit un post.
Le projet agit comme un “soft power” : discret, viral, et très difficile à contrer.
Une réponse douce à une hostilité massive
En recréant Israël dans Minecraft, les jeunes Israéliens ne cherchent pas à convaincre par la force des arguments, mais à toucher par l’expérience. En plongeant les joueurs du monde entier dans des récits visuels, immersifs et émotionnels, ils contournent les préjugés, ouvrent des portes là où le débat est verrouillé, et créent des ambassadeurs naturels là où on attendait des opposants. Un levier discret mais puissant face à une guerre de l’image largement perdue.
Vos réactions