L'histoire incroyable du Dr. Avi Yitzhak : « On m’a abandonné à dix ans. À quinze, ma mère m’a poignardé. »

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L'histoire incroyable du Dr. Avi Yitzhak : « On m’a abandonné à dix ans. À quinze, ma mère m’a poignardé. »

« Une vie banale est un luxe » : le récit bouleversant du Dr Avi Yitzhak, de la rue à la tête de l’hôpital Assuta Beer Sheva

De l’abandon à la médecine, le témoignage d’un homme qui n’a jamais renoncé

Dans le calme impersonnel d’un bureau d’hôpital à Beer Sheva, le Dr Avi Yitzhak parle d’une voix posée, mais chaque mot qu’il prononce porte en lui le poids d’un passé que peu auraient survécu. Aujourd’hui directeur médical de l’hôpital Assuta, premier médecin-chef éthiopien en Israël, il a accepté de revenir sur un parcours inimaginable. Pas pour se glorifier, mais pour montrer qu’il est possible de briser le déterminisme. Son histoire est un appel à la vie.

« On m’a abandonné à dix ans. À quinze, ma mère m’a poignardé. »

— Dr Yitzhak, comment commence votre histoire ?

« Je suis né à Addis-Abeba, en Éthiopie. J’étais un garçon brillant, curieux, très attaché à ma mère, comme tous les enfants. Mon père est parti quand j’avais dix ans. Parti sans un mot. Il n’est jamais revenu. À partir de ce moment-là, ma vie a basculé. »

— Et ensuite ?

« Ensuite, j’ai essayé de survivre dans une maison devenue hostile. Ma mère était brisée, violente. Je ne comprenais pas ce qui se passait. À quinze ans, un soir, elle m’a attaqué au couteau. J’ai fui. Ce n’était pas un choix. C’était fuir ou mourir. »

Il marque une pause. Son regard ne vacille pas. Il n’y a ni pathos, ni colère dans ses mots. Seulement des faits. Des faits qu’il raconte pour que d’autres n’aient pas à les vivre.

— Comment avez-vous tenu ?

« Une vie banale est un luxe. Moi, j’avais deux choix : survivre ou survivre. Et j’ai choisi de survivre, chaque jour. »

« Je suis arrivé en Israël seul, sans rien. J’ai choisi de devenir quelqu’un. »

— Comment êtes-vous arrivé en Israël ?

« Je suis monté en Israël seul. C’était un rêve, un instinct, une nécessité. Je n’avais rien. Pas de famille. Pas d’argent. Je dormais dans les rues, parfois dans des cages d’escalier. Mais je savais que si je voulais exister, je devais étudier. Alors j’ai étudié. Comme un forcené. »

— Qu’est-ce qui vous a poussé à faire médecine ?

« J’ai compris très tôt que soigner les autres me permettrait de réparer quelque chose en moi. Être médecin, ce n’était pas seulement un métier. C’était une revanche. Un moyen d’exister autrement. D’être utile. »

— Avez-vous senti des barrières à cause de vos origines ?

« Bien sûr. Être Éthiopien en Israël, c’est être suspecté d’avance de ne pas être à sa place. Il faut toujours prouver deux fois plus. Mais je ne suis pas là pour me plaindre. Je suis là pour ouvrir la voie. »

« Je suis devenu le premier lieutenant-colonel éthiopien de Tsahal. Et ensuite, médecin-chef. »

— Avant l’hôpital, il y a eu l’armée…

« Oui. J’ai servi dans Tsahal, et j’y suis devenu le premier lieutenant-colonel éthiopien. Je n’ai jamais voulu être un symbole. Mais je savais que si je ne franchissais pas les obstacles, d’autres ne le pourraient pas non plus. »

— Et aujourd’hui, vous dirigez un grand hôpital.

« Aujourd’hui, je suis à la tête de l’hôpital Assuta de Beer Sheva. Mais je ne cherche pas la reconnaissance. Mes ambitions sont modestes. Je n’ai pas besoin d’être le premier en quoi que ce soit. Il faut juste qu’il y en ait plus comme moi. »

— Que diriez-vous à un jeune garçon, dans la rue aujourd’hui, qui a perdu espoir ?

« Je lui dirais que personne ne peut t’enlever ta volonté. Personne. Même pas la douleur, même pas la pauvreté, même pas l’abandon. C’est dans les ténèbres que tu décides de devenir lumière. »

« Comment avez-vous supporté les échecs ? »

— Il y a forcément eu des moments d’échec avant de réussir… Vous avez dû faire face à beaucoup de rejets, non ?

« Oui, des dizaines. Je me souviens de ma première demande pour intégrer l’université : refusée. On m’a dit que je n’avais pas assez de moyens, pas le bon profil. C’était un coup. Mais à cet instant, je me suis dit : “Soit je laisse tomber, soit je redouble d’efforts.” J’ai choisi l’effort. J’ai travaillé encore plus dur. Et j’ai obtenu mon billet pour la faculté de médecine. »

— C’était quoi votre moteur intérieur ?

« Ce n’était pas la vengeance, ou la colère. C’était la conviction : je suis là pour faire le bien. J’ai vu trop de souffrance autour de moi. Je voulais offrir une chance aux autres, comme on ne m’en avait pas donné. »

« Le jour où tout a basculé… »

— Racontez-nous un moment clé qui a tout changé.

« Il y en a plusieurs, mais un reste gravé : mon premier acte de soin, en clinique pour mineurs. Un petit garçon éthiopien, gravement déshydraté. J’ai réussi à le stabiliser. Ses parents ont pleuré de gratitude. À cet instant, j’ai senti que je pouvais faire plus qu’apprendre les sciences : je pouvais sauver des vies. C’était une renaissance pour moi, un acte de justice. »

« Survivre, mais pour quoi ? »

— Vous avez dit que survivre était un choix. Aujourd’hui, pourquoi continuer à vous battre ?

« Pour transmettre. Pour que la souffrance ne soit pas vaine. Je continue parce qu’il y a tant à faire. Pour que d’autres Éthiopiens voient que ce n’est pas seulement possible, c’est normal. Je veux changer les normes, briser les préjugés. Et chaque vie sauvée est un pas vers ce monde plus juste. »

« Et demain ? Que voyez-vous pour l’avenir ? »

— Quel rêve nourrit le Dr Yitzhak aujourd’hui ?

« Je rêve d’un Israël où chaque enfant, peu importe ses origines, voit dans la science, la médecine, l’armée ou les arts un chemin ouvert. Je veux être un pont. Aujourd’hui médecin-chef, demain mentor, et après‑demain peut‑être enseignant. Tout ce que je fais, c’est pour que d’autres franchissent la porte plus facilement. »

— Que diriez-vous à ceux qui vous disent « bravo » ?

« Merci. Mais je réponds toujours : “Ne me dites pas bravo, commencez.” Bravo c’est bien. Mais rien ne vaut l’action. Chaque acte compte, même petit. Alors au lieu de me louer, faites. »

« Un message pour ceux qui rencontrent l’adversité »

— Vous avez un message fort à adresser à ceux qui traversent une épreuve aujourd’hui ?

« Oui. Vous êtes déjà plus forts que vous ne le pensez. Plus résilients. Plus capables. Et votre douleur n’est pas une fin : c’est un appel. Votre propre renaissance commence quand vous décidez de vous relever. Ne restez pas immobiles. Avancez un pas, puis un autre. Et souvenez‑vous : une vie banale est un luxe. Vous n’êtes pas ici pour exister, vous êtes ici pour agir. »

« Je suis là où je peux changer la réalité. C’est là mon pouvoir. »

Il le dit sans emphase. Comme un fait. Comme un choix. « Je suis là où je peux changer la réalité ; c’est là mon pouvoir. » Et cette phrase, à elle seule, résume l’homme : enraciné, debout, et tourné vers les autres.

Ce n’est pas un héros. C’est un survivant qui a refusé de ne devenir qu’une cicatrice. Un homme debout pour tous ceux qui, comme lui, auraient eu cent fois le droit de tomber.

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