Faut-il aimer ses bourreaux ? Réponse à Delphine Horvilleur et à ceux qui oublient le 7 octobre

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Faut-il aimer ses bourreaux ? Réponse à Delphine Horvilleur et à ceux qui oublient le 7 octobre


L’amour du prochain face au 7 octobre : le silence de la Torah et l’exigence de souveraineté

Alors que le peuple d’Israël vit une guerre existentielle depuis le 7 octobre, plusieurs figures de la pensée juive française — Delphine Horvilleur, Anne Sinclair, Joann Sfar — ont choisi de mettre en avant le concept talmudique de « l’amour du prochain ».
Louable en temps de paix, cette injonction morale devient inaudible, voire dangereuse, lorsqu’elle est exclusivement adressée à Israël, comme si seule la victime devait rester humaine pendant que ses bourreaux s’acharnent.

« Tendre la main » : jusqu’à se faire trancher le bras ?

Dans sa tribune publiée le 8 mai sur le site Tenou’a, Delphine Horvilleur invoque les idéaux fondateurs d’Israël et la Déclaration d’Indépendance : « tendre la main » à ses voisins. Cette phrase, arrachée à son contexte historique, ignore une réalité terrible : n’a-t-on pas tendu la main à nos voisins palestiniens ? Et ceux qui l’ont fait — ces Israéliens qui ont cru à la paix, travaillé avec les Palestiniens, partagé leurs terres, soigné leurs enfants, formé leurs médecins — n’ont-ils pas été les premiers massacrés le 7 octobre, dans une horreur indicible ? Ce jour-là, ce sont précisément les partisans de la coexistence qui ont été égorgés, brûlés, violés. Cette confiance a été leur condamnation.

Israël et les Palestiniens : une fausse symétrie

Delphine Horvilleur affirme : « Sans avenir pour le peuple palestinien, il n’y en a aucun pour le peuple israélien. » Pourquoi cette symétrie imposée ? Pourquoi faudrait-il lier un peuple enraciné depuis 3 000 ans sur cette terre à un autre, forgé en 1967 par Arafat dans une rhétorique de guerre ? En quoi l’avenir d’Israël dépendrait-il d’un projet national qui, depuis sa naissance, vise sa destruction ? Et si, justement, c’était cette dépendance forcée qui empêchait l’un et l’autre d’envisager un avenir ? Si leur séparation était la seule voie vers la paix ?

Le roi Saul, le prophète Samuel, et l’ordre de ne rien garder

Il existe dans les Écritures une sagesse ancienne, que Delphine Horvilleur, en tant que rabbin, ne peut ignorer. L’histoire du roi Saul est exemplaire. Victorieux contre les Philistins, il fut pourtant rejeté par Dieu pour avoir désobéi à une seule injonction du prophète Samuel : ne rien garder de l’ennemi. Pas un butin, pas un homme, pas une chèvre. Saul crut bien faire. Il laissa vivre. Il fut puni.

Que retenir ? Que le pardon hâtif peut être un péché. Que les ennemis du peuple juif ne sont pas là pour être domestiqués mais pour éprouver la fidélité d’Israël à sa mission : défendre sa souveraineté, non en demi-mesure, mais pleinement.

Le « prochain » : une définition sélective

L’amour du prochain est au cœur du judaïsme. Mais le Talmud, la Mishna et la Torah n’ont jamais exigé d’aimer celui qui veut votre mort. Dans sa lecture contemporaine, la tribune de Delphine Horvilleur universalise ce commandement sans en rappeler les limites bibliques. Le « prochain » est celui avec qui un lien d’humanité est possible. Ce n’est pas celui qui égorge des enfants, décapite des femmes, brûle des vieillards.
Tendre l’autre joue n’a jamais été un principe juif. D’ailleurs, même le Christ, à qui l’on attribue cette parole, ne l’a jamais appliquée ainsi. Tendre l’autre joue, ce n’est pas s’offrir à la violence, c’est affirmer : « Tu m’as frappé une fois, je suis encore là, debout. »

Humanisme mal placé : à qui s’adresse ce sermon ?

Quand Delphine Horvilleur écrit : « On n’apaise aucune douleur, on ne venge aucun mort en affamant des innocents », elle parle à Israël, pas au monde.
Pourquoi ? Pourquoi ce rappel moral ne s’adresse-t-il jamais aux bourreaux ?
À ceux qui ont fait de l’innocence un leurre pour mieux cacher les roquettes dans les écoles, les tunnels sous les berceaux ?
Après la Shoah, après 77 ans de terrorisme, et maintenant après le 7 octobre, n’est-ce pas Israël qui a le plus besoin qu’on lui rappelle qu’il est humain, parce qu’il est encore là malgré tout ? Et n’est-ce pas aux autres, aux nations, aux ONG, aux universités qui condamnent Israël, qu’il faut rappeler ce que signifie la dignité humaine ?

Israël ne peut survivre sans sa souveraineté spirituelle

Si Israël perd sa capacité à nommer ses ennemis, à faire la guerre quand il le faut, à appliquer la justice quand elle s’impose, il ne sera plus qu’une coquille vide. Une démocratie sans peuple, une promesse sans destin. C’est pourquoi il faut réaffirmer, avec la sagesse du roi Salomon : à qui appartient cette terre ? À celui qui la défend, qui lui donne vie, qui en fait jaillir la justice.

Les sermons moralisateurs n’ont d’impact que lorsqu’ils s’adressent à tous. Adresser l’amour du prochain uniquement à Israël, c’est nourrir l’asymétrie qui tue. Le peuple juif a assez payé de sa naïveté. L’heure est venue non de tendre la main à ceux qui nous tranchent la gorge, mais de défendre ce qui est nôtre — avec justice, sans haine, mais avec force.

Claudine Douillet

 

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