
Ils se disent gardiens d’Israël, pionniers du retour sur la terre promise.
Eux, ce sont les jeunes des collines — des adolescents et jeunes adultes venus s’installer dans des avant-postes sauvages, sans autorisation de l’État, au cœur de la Judée-Samarie.
Mais derrière leurs kippas, leurs brebis et leurs slogans bibliques, se cachent parfois des milices violentes, prêtes à en découdre, y compris avec Tsahal.
Ces derniers jours, la tension a franchi un seuil dangereux : des soldats de réserve ont été roués de coups, menacés de mort, leurs véhicules vandalisés.
Et le pays tout entier s’interroge : comment en est-on arrivé là, où des jeunes juifs en viennent à traiter leurs propres soldats de “nazis” ? Plongée au cœur d’un conflit fratricide.
Une escalade de violences contre l’armée dans la région de Binyamin
Le commandant du bataillon de réserve 7114, le lieutenant-colonel (réserve) G., dresse un tableau glaçant de l’agression dont lui-même et ses soldats ont été victimes lors d’une intervention près du village de Malakh, en Judée-Samarie, dans la nuit de samedi à dimanche.
Déploiement nocturne pour disperser des jeunes ayant pénétré en zone militaire, ce qui s’est transformé en une attaque concertée d’une rare brutalité :
« Nous les avons vus étrangler l’un de nos combattants ; pour ma part, j’ai reçu des coups de poing ; ils ont assailli l’un de nos véhicules à coups de pierres ; ils ont enfoncé un blindé léger [“David”] ; ils ont crevé les pneus de nos véhicules ; et ils nous ont menacés de nous empêcher de sortir vivants de là »
Une situation qui s’enracine dans la durée
« Il s’agit d’un événement récurrent, qui ne commence pas hier », souligne le lieutenant-colonel G. Ce dernier sert dans cette zone depuis vingt ans ; la région de Binyamin lui tient plus à cœur que tout autre, insiste-t-il.
Et pourtant, au lieu de se consacrer exclusivement à prévenir le terrorisme, ses hommes passent 90 % de leur temps à empêcher des incendies délibérés provoqués par ces jeunes : « Notre mission est de protéger la colonie, pas de détourner l’attention en raison de ces débordements. Ce sont les habitants qui sont mis en danger »
Harcèlement et insultes la veille du drame
La tension est également montée à un niveau personnel : la veille des incidents, le lieutenant-colonel G. rapporte avoir été traité de « nazi », couvert d’insultes et même craché au visage .
Contexte plus large et enjeux militaires
Un officier supérieur de Tsahal confirme que la plupart des assaillants sont des non-résidents de Judée-Samarie, envoyés vers un avant-poste illégal évacué récemment près de Beit Haẓor, érigé sur des terres palestiniennes privées.
Ils seraient arrivés masqués, au bord de véhicules et armés, pour mettre le feu dans le village de Malakh.
L’intervention militaire a été interrompue par des tirs, ouvrant la voie à des hostilités armées croisées, qui ont coûté la vie à trois Palestiniens, deux d’entre eux ayant déjà été incarcérés en Israël pour terrorisme ().
Trois jeunes ont été arrêtés puis relâchés le lendemain pour manque de preuves les reliant directement aux faits. L’armée avertit : sans renforcement rigoureux, de telles actions se répéteront.
Lexus stratégique du commandement supérieur
Le week-end dernier, Tsahal a renforcé ses positions dans la région. Le chef d’état-major, le général Eyal Zamir, s’est rendu sur place auprès du bataillon 7114 et déclaré son soutien total aux soldats : « Ces débordements entravent notre mission – protéger la population et prévenir le terrorisme. Si ces violences ne sont pas traitées de manière ferme et systématique, elles pourraient conduire à un désastre »..
Il a salué le professionnel et le courage des réservistes, « l’élite de l’armée israélienne », insisté sur la nécessité d’une coordination avec la police et la police frontalière, et exigé que les responsables soient tenus pleinement responsables de leurs actes.
Contexte chiffré et montée en intensité des violences
Selon des données officielles, les violences des jeunes des collines en Judée-Samarie ont grimpé de 30 % en 2025 comparé à l’an dernier, une accélération particulièrement marquée dans les zones de Bethléem et Jéricho.
En 2024, plus de 1 400 incidents ont été recensés, un record historique .
Formes diversifiées de harcèlement collectif
Les attaques ne se limitent pas aux affrontements physiques : les jeunes des collines multiplient les « price-tag attacks » – actes de vengeance symbolique impliquant incendies de véhicules, saccages de propriétés et intimidation systématique .
Appels à la justice civile et réactions politiques
Le chef du conseil régional de Binyamin, Yisrael Gantz, a exigé une enquête indépendante sur l’usage de balles réelles par Tsahal : « Il n’y a pas de place pour la violence – surtout contre les forces de sécurité ; qui agit ainsi doit répondre de ses actes. Les images montrent que les soldats ont agi de manière inappropriée. Il faut clarifier cette affaire immédiatement. Un tir en pleine poitrine d’un adolescent est un événement extrêmement grave et ne peut pas être banalisé »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a condamné dès samedi soir les violences des colons, a rappelé que « l’État de droit s’applique à tous, et personne ne peut se faire justice soi-même ». Il a ordonné une enquête exhaustive et assuré que « les responsables seront sanctionnés »
Cet épisode révèle un paradoxe : dans une zone sensible, toujours au cœur de tensions quotidiennes, Tsahal se retrouve détourné de ses missions prioritaires, absorbé par la protection de colons violents. Le lieutenant-colonel G. et ses hommes, régulièrement mobilisés, se trouvent en première ligne d’une crise croissante, aux implications tant militaires que politiques.
Vos réactions