
Mooky, du chaos à la foi : « Le 7 octobre, je suis devenu un homme croyant »
Le massacre du 7 octobre, une date brisée à jamais
Il y a des dates qui deviennent des gouffres. Pour Mooky, le 7 octobre était jusque-là une journée lumineuse, celle de son mariage avec sa femme N’vel, célébré dix-huit ans plus tôt. Mais en 2023, à la même date, le carnage du Hamas pulvérise cette mémoire heureuse. Comme des millions d’Israéliens, il est frappé de stupeur.
Mais chez lui, cette douleur produit autre chose : une secousse spirituelle, une transformation intime.
Le lendemain même du massacre, il commence à poser les téfilines chaque matin. Non pas comme un automatisme religieux, mais comme une nécessité profonde, comme un appel. Il se rend à la synagogue à pied, respecte le Shabbat, lit, apprend, pratique certaines mitsvot. Il confie simplement : « Je me rapproche du judaïsme ». Ce n’est pas un discours. C’est un changement de vie.
Une fierté juive affirmée, une réponse à ceux qui veulent l’effacer
Ce geste de retour à la foi n’est pas une mode ni une imitation. C’est un cri d’existence. Mooky raconte qu’il a même modifié la date de ses anniversaires de mariage, abandonnant le calendrier grégorien pour revenir au calendrier hébraïque.
Il ne voulait plus que le 7 octobre demeure comme un souvenir heureux souillé par l’horreur. Interrogé sur ce basculement, il répond sans détour :
« Le 07/10 m’a ramené à la maison. Ils veulent m’effacer parce que je suis juif ? Je deviendrai super-juif. Je suis encore plus fier de ce que je suis, de mon peuple, de mes racines, de mon lieu, de ma terre.
Et cet endroit, c’est le nôtre, et nous devons tout faire pour le protéger. Ce n’est pas du tout discutable. » À ceux qui lui demandent s’il parle d’un lieu symbolique ou d’un territoire, il répond avec force : « Combat pour une terre, pas pour la terre – pas intéressante pour moi. C’est le nôtre, c’est notre lieu, et nous devons tout faire pour le protéger – et nous protéger.»
Une pratique sincère, une fidélité intérieure
Mooky ne se met pas en scène. Il ne cherche pas à paraître religieux. Il agit par cohérence. Il affirme que ces gestes, ces rituels, renforcent ce qu’il ressent au fond de lui.
Certains proches lui disent qu’il semble changé.
Mais il les regarde et dit : « Ce n’est pas ce qui me définit. Je dois rester fidèle à ce à quoi je dois être fidèle. » Il ne renie rien de son passé artistique.
Même ses chansons anciennes, légères ou potaches, il les chante encore. Il évoque même avec tendresse « Le plieur de bananes », un de ses titres de jeunesse, qu’il continue d’interpréter sur scène. Il ne rejette pas ce qu’il a été. Mais il assume écrire différemment aujourd’hui. Il vit autrement. Il pense autrement.
Une vie dépouillée, disciplinée, en dehors du troupeau
Depuis sa transformation, Mooky a quitté le tumulte des villes. Il vit dans un moshav du nord du Sharon. Son mode de vie est radicalement épuré. Il ne consomme aucun sucre, aucun aliment transformé. Il ne prend aucun médicament. Il fabrique lui-même sa lessive, son savon, son dentifrice, son déodorant. Il s’entraîne. Il médite. Il se définit ainsi :
« Je suis amateur de vie off-grid, je pense par moi-même, je ne veux pas être avec le troupeau. » À la maison, tout le monde ne suit pas forcément son exemple, mais il insiste : « Dans ma maison, il n’y a pas de sucre. »
Une vision désenchantée de la paix : le 7 octobre a tout effacé
La guerre n’a pas seulement ébranlé ses habitudes. Elle a effondré ses convictions politiques. Lui qui croyait à la paix, aux accords, au dialogue, ne croit plus aux mirages diplomatiques. Il confesse : « L’illusion qu’il pourrait y avoir une paix avec l’islam radical s’est effondrée. Le concept des accords de paix, autour duquel tout tournait depuis des décennies, est parti le 7 octobre. La seule paix possible est une paix à partir de la force, non une paix de ‘laissez-lever le soleil’. »
Présent partout : auprès des soldats, des évacués, en zone de guerre
Mooky n’est pas resté dans le silence. Dès les premiers jours de la guerre, il a donné plus de cent-vingt concerts, parfois dans des conditions extrêmes. Il se souvient d’une scène bouleversante :
« Je montais sur scène devant trois soldats sous des tirs d’artillerie – tu perds le souffle, tu entends la déflagration, mais tu continues. Parce que tout ce que je veux, c’est être là, et faire ce que je peux. »
Quand on lui parle des pétitions d’artistes demandant la fin des hostilités, sa réponse est sans détour : « Je ne signerai pas ça. Je ne suis pas d’accord. Point. »
Ce refus est une posture éthique, presque sacrée. Il exprime aussi une admiration immense pour les soldats de réserve.
« Ces soldats, ces réservistes, m’ont ému jusqu’au fond de mon âme… Les gens qui mettent de côté tout ce qu’ils ont pour notre cause. Ce sont les plus incroyables que cette terre puisse avoir à offrir. Nous devons en prendre soin. »
Une renaissance artistique portée par cette foi nouvelle
Aujourd’hui, Mooky revient sur scène. Il prépare son septième album solo, qu’il espère sortir en novembre. Il remonte aussi sur les planches, notamment au Barbey, avec un tout nouveau spectacle, visuellement et musicalement réinventé.
Les arrangements sont retravaillés. Les lumières, les sons, tout est neuf.
Mais son passé artistique reste intact. Il ne le renie pas. Il l’intègre.
Ce qu’il vit n’est pas un reniement, c’est une élévation. Une mutation intérieure, profonde. Il n’a pas changé pour plaire. Il a changé parce qu’il a entendu quelque chose. Quelque chose de silencieux, mais irrévocable.
Un homme debout, enraciné, brûlant de foi
Mooky n’est plus l’artiste d’avant. Il n’est pas non plus un nouveau religieux en quête de reconnaissance. Il est un homme qui, dans les décombres du 7 octobre, a trouvé sa vérité. La prière, le silence, l’étude, les gestes du Shabbat ne sont plus pour lui des traditions anciennes. Ce sont des actes de survie, des piliers pour tenir debout dans un monde fracturé. Il ne dit pas qu’il a toutes les réponses. Mais il sait désormais une chose : « Je suis devenu un homme croyant ».
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