Les médias israéliens sous tension : quand la liberté d’expression s’invite à l’antenne

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Les médias israéliens sous tension : quand la liberté d’expression s’invite à l’antenne

Les médias israéliens sous tension : quand la liberté d’expression s’invite à l’antenne

En plein débat législatif sur les réformes de l’audiovisuel, la journaliste Adi Zarifi monte au créneau en direct pour alerter : « ceci vise à dissuader, à faire taire et à contrôler ».
Son intervention marque un moment clé, nourri par le refus de la majorité de respecter l’avis du conseil juridique – et soulève la question de l’indépendance des médias en Israël.

Le mouvement de contestation

Ce jeudi matin, lors de l’émission « חדשות הבוקר » sur la chaîne Keshet 12, Adi Zarifi a pris la parole pour dénoncer publiquement une réforme portée par le ministre des Communications Shlomo Kar’i. Cette réforme vise à instaurer un comité spécial dédié aux questions de l’audiovisuel à la Knesset, avec la perspective de modifier la régulation et le contrôle des médias. 

Elle a notamment pointé le fait que plusieurs des textes proposés sont présentés « en dépit de l’avis du conseil juridique », ce qui, selon elle, ouvre la voie à un précédent inquiétant. 

Une tribune directe et assumée

« En général, dans ce genre de chronique, nous, dans les médias, nous utilisons la tribune pour adresser une critique aux décideurs. Cette fois, avec votre permission, je vais utiliser ce temps pour m’adresser directement à vous », a-t-elle déclaré en s’adressant aux téléspectateurs. 

Elle poursuit : « Dans les jours à venir, vous entendrez parler de la manœuvre visant à prendre le contrôle des médias en Israël, menée par le ministre Kar’i. Qui en parlera ? Des médias eux-mêmes, très probablement. Cela ressemble toujours à un média qui parle de lui-même. Peut-être. Mais pas seulement. » 

Le cœur de l’alerte

Adi Zarifi insiste : « Cela veut dire que toute loi pourra passer même si l’avis du conseil juridique s’y oppose, comme, par exemple, la ‘loi du recrutement’ ou la ‘loi de l’exemption de recrutement’. Les bâtons que le gouvernement tiendra dans la cadre de la loi à l’égard des médias sont destinés à dissuader, à faire taire, à contrôler via l’ingérence dans l’audience, les amendes et la suppression de la séparation importante entre les départements d’information et l’enveloppe du canal — et c’est ce qui garantit notre indépendance, car nous devons cette indépendance uniquement à vous. » 

Elle ajoute : « Et les carottes ? Elles sont déjà distribuées à ceux dont l’attitude est favorable aux puissants, aux ministres du gouvernement, sous forme d’argent public et de facilités diverses. » 

Sa conclusion mérite attention : « Dans ce cas-ci, il existe une occasion rare de voir l’avenir sur cette trajectoire », avant de citer l’exemple de la Hongrie :
« Voyez la Hongrie ; les journalistes là-bas ont l’air bien et libres mais c’est le pouvoir qui dicte le cadre. Et vous ? Vous avez appris à qui le pouvoir fait confiance. » 

Les enjeux sous-jacents

Au-delà de l’alerte, ce discours soulève plusieurs questions fondamentales.
D’abord l’indépendance des médias face à l’exécutif : la séparation entre information et sphère politique est mise à mal lorsque les règles peuvent être imposées malgré l’avis légal.
Ensuite, la régulation des audiences, le financement public et la structure des chaînes de télévision deviennent des leviers de contrôle politique – non plus seulement techniques mais stratégiques. Enfin, l’appel au spectateur comme arbitre ultime de l’indépendance suggère une remise en cause du rôle traditionnel des journalistes.

Pourquoi maintenant ?

Le calendrier parlementaire est déterminant. La réunion de la commission de l’économie de la Knesset a relancé le débat sur les lois de l’audiovisuel, sous l’impulsion du ministre Kar’i.  Le projet de création d’un comité spécial pourrait redéfinir la manière dont les médias sont encadrés en Israël – et potentiellement affaiblir les garanties d’autonomie.

Dans cet environnement politique instable, l’intervention d’Adi Zarifi agit comme un signal d’alarme clair : un média peut-il encore exercer son métier en toute liberté lorsque la loi elle-même est susceptible de s’imposer contre l’avis de ses propres conseillers juridiques ?

En choisissant de s’adresser directement aux téléspectateurs, Adi Zarifi déplace le lieu du débat : des coulisses de la législation à l’écran, au cœur de l’audience. Son message est limpide : ce qui se joue n’est pas seulement une loi sur l’audiovisuel, mais la sauvegarde d’un pilier démocratique. Et si cette bataille est remportée, elle reconfigurera la relation entre pouvoir, médias et public en Israël.

Le spectateur est ici appelé non plus à consommer, mais à choisir. Et ce choix pourrait bien redéfinir le paysage médiatique pour longtemps.

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