
Enquête inédite au Canada : des soldats israéliens visés, la diaspora en état de choc
Un tournant judiciaire aux allures de bras de fer diplomatique
C’est une première qui fait l’effet d’un séisme au sein des communautés juive et israélienne du Canada. Pour la toute première fois, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a ouvert une enquête criminelle contre des citoyens canadiens ayant servi dans l’armée israélienne lors de la guerre à Gaza.
Ces soldats, certains de double nationalité, sont soupçonnés de crimes contre l’humanité. L’information, révélée par le Toronto Star, a jeté un froid glacial sur les relations déjà tendues entre Ottawa et Jérusalem.
« Le Canada devient chaque jour plus hostile », confie une source au sein de la communauté juive locale. Une inquiétude d’autant plus vive que cette enquête n’émane pas d’un collectif militant ou d’un cabinet d’avocats, mais bien du gouvernement lui-même, à travers son Programme national sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre (PCCHCG), qui associe la GRC, le ministère de la Justice, l’Agence des services frontaliers et les Services de citoyenneté et d’immigration.
Un climat d’angoisse : la menace d’une vague d’arrestations plane
Les Canadiens visés sont d’anciens soldats de Tsahal, qu’ils aient été enrôlés dans la force régulière ou dans la réserve. Nombre d’entre eux sont ce que l’on appelle des « soldats isolés », venus combattre pour Israël pendant la guerre et rentrés ensuite dans leur pays de citoyenneté. Désormais, ces jeunes hommes et femmes sont exposés au risque de poursuites judiciaires, voire d’arrestations, sur leur propre sol.
Dans les groupes WhatsApp de la communauté israélienne au Canada, l’effervescence est palpable. « Il ne reste qu’une seconde avant qu’ils ne lancent des mandats d’arrêt contre des “criminels de guerre”. Les enfants canadiens qui étaient ou sont encore dans l’armée seront poursuivis à leur retour au Canada. C’est très grave, mes amis. Des avocats s’occupent déjà de cette affaire », a alerté un membre. Un autre a réagi avec amertume : « Vous ne lisez pas entre les lignes – le simple fait que cela se produise est la source de l’antisémitisme. »
Plus encore, la comparaison avec les réfugiés venus de Gaza, installés sur le territoire canadien, suscite une colère sourde. « Les Gazaouis qui sont arrivés ici ne font l’objet d’aucune enquête », rappelle un autre message, dénonçant ce qui est perçu comme un deux poids deux mesures.
Le spectre de l’antisémitisme et une pression diplomatique sans précédent
Ce climat d’insécurité juridique et morale s’ajoute à une série de tensions croissantes entre le Canada et Israël. Il y a deux semaines, Ottawa a menacé, aux côtés du Royaume-Uni et de la France, d’imposer des sanctions contre l’État hébreu. Dans un communiqué commun, les trois pays ont qualifié l’escalade à Gaza d’« insupportable » et exigé l’arrêt immédiat des opérations militaires, ainsi que la levée des restrictions humanitaires.
« Cela incite les Israéliens à réfléchir à deux fois avant d’envoyer leurs enfants servir en Israël comme soldats isolés », témoigne une mère israélienne vivant à Montréal. « Le Canada nous devient de plus en plus hostile chaque jour. »
Sous couvert de justice internationale, le Canada franchit ici un seuil inédit. En visant ses propres citoyens pour des faits liés à un engagement militaire en Israël, Ottawa met en cause non seulement une alliance historique, mais surtout un lien identitaire puissant entre deux patries, deux loyautés, et une jeunesse qui ne cherchait qu’à servir.
La communauté juive canadienne, déjà ébranlée par une montée des actes antisémites depuis le 7 octobre, redoute que cette nouvelle étape ne fragilise encore davantage sa place dans la société. Un citoyen israélo-canadien le résume en ces mots : « C’est une rupture de confiance. Nous avons grandi ici, mais aujourd’hui, on nous regarde comme des suspects. »
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