MOGADISCIO,le 01/05/08 - Des avions de guerre américains ont tué un rebelle islamiste présenté comme le dirigeant d'Al Qaïda en Somalie ainsi qu'une trentaine d'autres personnes.
Selon des rebelles, Aden Hachi Ayro, qui a dirigé la milice al Chabaab, responsable de fréquentes attaques contre les troupes gouvernementales somaliennes et éthiopiennes, a trouvé la mort dans un bombardement mené par les forces américaines, qui ont pris pour cibles plusieurs dirigeants islamistes ces derniers mois.
"Il est vrai que des avions infidèles ont bombardé Doussamareb. Deux de nos responsables, dont Ayro, ont été tués dans cette attaque", a déclaré à Reuters Moukhtar Robow Adoumansour, un chef militaire des islamistes. Doussamareb est une localité située dans le centre de la Somalie.
Le décès de cet activiste formé en Afghanistan devrait aider le gouvernement somalien, soutenu par les pays occidentaux, à freiner une insurrection qui semble gagner du terrain.
Mais il devrait aussi provoquer la colère des compagnons d'armes d'Ayro, qui disent mener un djihad (guerre sainte) pour chasser les forces éthiopiennes qui soutiennent le gouvernement provisoire.
Un chef local a dit que 30 corps avaient été retrouvés dans les décombres.
RÔLE-CLÉ
Ayro jouait un rôle clé dans la guérilla islamiste menée contre les forces somaliennes et éthiopiennes. Les violences se sont intensifiées ces dernières semaines, faisant de nombreux morts à Mogadiscio et dans d'autres villes où les islamistes ont mené des attaques-éclair.
"Son élimination est très importante", estime M.J. Gohel, chef de la Fondation Asia-Pacific, un institut de réflexion spécialisé dans les questions de sécurité et basé à Londres.
Mais "le degré de pénétration d'Al Qaïda en Somalie est tel qu'il sera remplacé. C'est un coup dur (pour les activistes) et ils vont le ressentir, mais ce n'est pas un coup mortel."
Des habitants de Doussamareb ont rapporté que plusieurs autres combattants de la milice al Chabaab ainsi que des civils avaient été tués dans cette frappe menée avant l'aube. Selon un habitant, la maison de pierre visée par la frappe a été totalement détruite.
Un témoin interrogé par Reuters, Farah Hussein, a évoqué pour sa part des "morceaux de chair humaine (jonchant) les ruines de l'habitation" où se trouvait Ayro. "Les gens comptent les crânes pour savoir combien il y a de victimes", a-t-il ajouté.
Amina Warsame, une autre habitante, rapporte que la ville a été réveillée par deux puissantes explosions à 02h00 heure locale (mercredi 23H00 GMT).
"Lorsque nous sommes sortis, nous avons vu une maison du quartier entièrement détruite par deux missiles tirés par des avions volant au-dessus de nos têtes. Nous avons dénombré quatre avions", a déclaré Amina Warsame. Selon la radio Chabelle, il s'agissait d'avions de combat américains AC-130.
UNE MILICE CLASSÉE ORGANISATION TERRORISTE
Robow a dit qu'Ayro avait formé de nombreux combattants: "Nous savons que notre ennemi est heureux aujourd'hui, mais leur travail va continuer."
Selon des sources au sein des services de sécurité et de renseignement, Ayro vivait dans la clandestinité depuis qu'il avait échappé à une frappe américaine, en janvier 2007. Il avait pris la tête du réseau local d'Al Qaïda en Somalie après avoir suivi un entraînement en Afghanistan à la fin des années 1990.
Fin février, Washington a officiellement placé la milice al Chabaab sur la liste des organisations terroristes, au motif qu'elle possède des liens étroits avec le réseau d'Oussama ben Laden.
Al Chabaab est l'aile militaire des Tribunaux islamiques, qui se sont emparés d'une grande partie du sud de la Somalie en 2006 avant d'en être chassés par les forces fidèles au gouvernement de transition somalien avec l'aide de l'armée éthiopienne.
Sous la férule d'Ayro, les miliciens islamistes ont adopté les tactiques des insurgés irakiens, multipliant les assassinats et les attentats au moyen de mines déposées sur les routes. Al Chabaab a par ailleurs revendiqué un attentat suicide.
Selon des diplomates et des responsables de service de sécurité occidentaux, al Chabaab est également responsable de l'assassinat de journalistes et de travailleurs humanitaires et de la profanation en 2005 d'un cimetière italien datant de l'époque coloniale.