
Les industries de défense israéliennes recrutent massivement dans la high-tech
Un nouvel eldorado pour les ingénieurs
Alors que la guerre qui a éclaté le 7 octobre continue de bouleverser l’économie israélienne, un phénomène inattendu se dessine : des milliers de professionnels de la haute technologie, frappés par les licenciements, se tournent désormais vers un secteur autrefois délaissé — celui des industries de défense.
Des entreprises telles que Rafael, Elbit Systems et Israel Aerospace Industries (IAI) connaissent un essor fulgurant, attirant les talents de la tech grâce à des primes de signature spectaculaires, une stabilité salariale et la promesse de participer à une mission nationale.
“Nous recevons de nombreux CV de personnes issues de la high-tech”, témoigne un responsable RH chez Elbit Systems. “Des gens qui, il y a quelques années, ne considéraient même pas notre secteur.”
Des salaires attrayants et une mission patriotique
Depuis le début de l’année 2024, Elbit a embauché plus de 2 500 nouveaux employés, avec l’objectif de recruter un chiffre similaire en 2025. Ces profils sont variés : ingénieurs logiciels, ingénieurs hardware, techniciens, ouvriers spécialisés en production, etc. Rafael n’est pas en reste : environ 1 800 nouveaux employés y ont été intégrés depuis le début de l’année, dont plusieurs centaines d’ingénieurs expérimentés.
Ces groupes offrent des salaires élevés, parfois supérieurs à 50 000 shekels par mois, selon les fonctions et l’expérience. Certaines primes à la signature peuvent atteindre jusqu’à 150 000 shekels pour les postes les plus critiques.
En comparaison, ces chiffres rivalisent avec ceux des startups de la Silicon Wadi, mais avec une stabilité que la plupart de ces entreprises tech ne peuvent plus garantir depuis 2023.
“Ce qui attire beaucoup, ce n’est pas seulement l’argent. C’est aussi l’idée de participer à l’effort de guerre, à quelque chose de plus grand”, explique un ingénieur récemment recruté chez Rafael, après avoir été licencié d’une entreprise de cybersécurité.
Les géants de la défense en plein boom
Ce redéploiement massif de talents vers l’industrie militaire n’est pas anodin. Depuis octobre, la demande pour les systèmes de défense, les capteurs, les systèmes de communication et les munitions intelligentes a explosé. Les contrats gouvernementaux affluent, les budgets de la défense sont réévalués à la hausse, et les exportations augmentent. Rafael, qui produit notamment le système Dôme de fer, connaît une demande sans précédent.
Les entreprises investissent donc non seulement dans la production, mais aussi dans le développement de technologies de pointe, notamment dans les domaines de l’IA, des capteurs, de l’analyse d’image, des logiciels embarqués et des communications sécurisées. Ce sont justement les compétences des anciens salariés de la high-tech.
“Nous avons l’occasion de travailler sur des projets de pointe qui changent la donne sur le champ de bataille”, explique un cadre de IAI. “Ce sont des défis intellectuels passionnants.”
Une migration sectorielle durable ?
Cette dynamique soulève une question : assiste-t-on à un glissement durable de l’élite technologique israélienne vers la défense ? Ou bien s’agit-il d’un phénomène temporaire, lié à la guerre et à l’instabilité du marché global ?
Les experts sont partagés. Si certains estiment que le retour de la croissance dans la high-tech privée attirera de nouveau les talents, d’autres affirment que l’image des industries de défense a changé durablement.
“Les jeunes ingénieurs, y compris ceux sortis de l’armée, voient désormais dans la défense un avenir technologique crédible”, estime un analyste du marché de l’emploi.
Une guerre qui redéfinit les priorités
En Israël, la guerre n’a pas seulement modifié les équilibres géopolitiques : elle redéfinit aussi les priorités économiques et professionnelles d’un pays où la technologie reste l’un des premiers moteurs de croissance.
L’industrie de défense, longtemps perçue comme un bastion rigide, est en train de devenir le nouveau pôle d’attraction pour une génération en quête de sens, de sécurité et d’utilité nationale. Et cela, les géants de l’armement l’ont bien compris.
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