
Le kibboutznik de 80 ans qui a stupéfié le pays : le récit bouleversant de sa libération après 482 jours de captivité
Lorsqu'il est sorti, debout et souriant, après 482 jours en enfer, Gadi Mozes a laissé une nation entière sous le choc. Pourtant, pour sa famille et ses amis, cette image d'un homme éprouvé mais intact n'avait rien de surprenant.
Ses trois enfants l'attendaient à la maison, ainsi que Doron Asher, la fille de sa compagne assassinée lors du massacre du 7 octobre.
Comment a-t-il tenté de sauver les siens face à l'horreur ? Comment a-t-il survécu à la captivité ? Et comment ses amis vignerons ont-ils réagi en voyant son retour miraculeux ?
Un sourire face à l'enfer
L'image restera gravée dans les mémoires : celle de Gadi Mozes, entouré de miliciens du Hamas, pris au piège dans le chaos de milliers de Gazaouis prêts à le lyncher—et pourtant, il souriait. Un sourire sage, celui d'un kibboutznik du sud d'Israël, forgé dans une résilience qui semble inébranlable.
Et cette phrase, prononcée peu après sa libération, résonne comme un défi face à l'abandon de l'État qui l'a laissé captif : "Je ferai tout ce que je peux pour réhabiliter Nir Oz."
Une attente insoutenable
Lorsque Gadi et Arbel Yehud ont été remis au Comité international de la Croix-Rouge, trois de ses amis vignerons – Genya Sminlansky, Elyashiv "Shibi" Drori et Haim Gan – étaient réunis à Jaffa, rivés à leur écran. Depuis vingt ans, ils partagent avec Gadi une passion commune : le vin.
"Gadi est un homme fort. Gadi est un homme solide. Gadi est un homme de la terre", souligne Haim Gan.
— "En esprit, il est fort", ajoute Genya.
— "Et il est en très bonne santé", renchérit Haim.
Quand les images du convoi de la Croix-Rouge apparaissent à l'écran, la tension est à son comble. "Je veux le voir, m'assurer qu'il va bien", dit Haim. Mais ce qui devait être un processus rapide vire à l'attente insupportable.
Le sacrifice d'un homme
Le 7 octobre, alors que le Hamas massacre, incendie et enlève sans la moindre résistance de Tsahal, Gadi Mozes tente l'impensable. Chez lui se trouvent sa compagne Efrat Katz, sa fille Doron et ses deux petites-filles.
Face aux terroristes, il prend une décision : se livrer, prétendant être seul dans la maison, pour donner une chance à sa famille de survivre.
Quelques heures plus tard, il revient pourtant vers elles : "Ils ont mis la maison sens dessus dessous. Je leur ai donné de l'argent, les clés de la voiture, tout ce qu'ils voulaient. J'espère que cela suffira." Mais l'armée israélienne n'arrive pas. Et lorsque les terroristes reviennent, ils emmènent tout le monde.
Efrat Katz sera tuée par des tirs d'hélicoptères de Tsahal sur le véhicule dans lequel elle avait été enlevée par les terroristes du Hamas.
Doron et ses filles, elles, seront libérées dans le cadre d'un premier accord d'échange. Quant à Gadi, il disparaît pendant des mois, jusqu'à la vidéo glaçante de décembre 2023, dans laquelle il apparaît aux côtés d'Elad Katzir, un autre otage qui sera plus tard assassiné.
Une résilience hors norme
De sa captivité, Gadi ne révèlera que peu de choses. Mais une chose est certaine : chaque jour, il marchait sept kilomètres dans sa cellule exiguë, comptant les bosses au sol, estimant les distances, refusant de laisser son esprit céder.
Pendant ce temps, ses amis ne l'oublient pas. Haim Gan, Shibi Drori et d'autres décident de sauver le vignoble qu'ils ont construit ensemble, malgré les risques et les restrictions militaires. "En sauvant ces vins, nous préservions une partie de ces hommes", explique Shibi.
Aujourd'hui, le fils et le petit-fils de Gideon Pauker, un autre ami assassiné à Nir Oz, prévoient d'agrandir la cave. Objectif : 30 000 bouteilles par an d'ici cinq ans.
Un retour au goût amer
Lorsque Gadi retrouve enfin ses proches, l'émotion est à son comble. Ses amis vignerons portent un toast : "Gadi, voici la bouteille que tu as laissée derrière toi. L’odeur d'une chèvre. L'odeur du passé."
Mais pour Gadi, ce passé est à reconstruire. Son kibboutz, Nir Oz, est en ruines. Les survivants sont toujours à Kiryat Gat. L'État d'Israël, qui a mis un an et quatre mois à le ramener, n'a toujours pas trouvé les moyens de rebâtir la communauté détruite.
Alors, comme il l'a dit, il fera tout ce qu'il peut pour réhabiliter Nir Oz. Et au vu de son sourire et de sa détermination, il se pourrait bien que ce soit lui qui finisse par réhabiliter le pays.
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