Israël vote la peine de mort pour les terroristes : première lecture historique à la Knesset

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Israël vote la peine de mort pour les terroristes : première lecture historique à la Knesset

Dans une ambiance électrique, la Knesset a adopté en première lecture la loi réclamée depuis des années par Itamar Ben Gvir et son parti Otzma Yehudit : la peine de mort pour les terroristes responsables de meurtres à motivation nationaliste. Une décision symboliquement puissante, politiquement explosive, et religieusement contestée jusque dans les rangs de la coalition.

Un vote sous tension, un symbole assumé

Lundi soir, la Knesset a voté en première lecture la proposition de loi dite « Hok onesh mavet le-mehablim », littéralement loi sur la peine de mort pour les terroristes. Présenté par la députée Limor Son Har-Melech, rescapée d’un attentat et figure du parti Otzma Yehudit, le texte a été adopté par 36 voix contre 16.

À peine le résultat proclamé, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir a sorti des baklavas qu’il a distribués aux députés de la coalition, transformant la victoire en célébration orientale. L’opposition, elle, a quitté la salle dans la fureur.

Le débat, d’ailleurs, avait tourné à la confrontation physique : Ayman Odeh, député arabe d’Hadash, a accusé la coalition de vouloir instaurer un « transfert » et traité ses adversaires de « bande de faibles ». Les huissiers ont dû intervenir pour séparer Odeh et Ben Gvir, sous les cris des élus.

Ce que prévoit réellement la loi

La proposition de loi vise à modifier le code pénal israélien pour autoriser les tribunaux à prononcer la peine capitale contre tout terroriste coupable de meurtre à motivation nationaliste d’un citoyen israélien.

Concrètement, il s’agit de cas d’attentats commis par des Palestiniens ou des résidents arabes contre des Juifs israéliens. Le texte, dans sa version actuelle, ne s’applique pas à un Israélien qui tuerait un Palestinien, ce que l’opposition dénonce déjà comme une dérive raciale.

Les partisans de la loi affirment qu’elle constitue « la seule vraie dissuasion » contre le terrorisme, et qu’elle permettra d’en finir avec les échanges de prisonniers qui ramènent dans la nature des assassins déjà condamnés à perpétuité.

« Un terroriste mort ne revient pas frapper. Il ne sort pas de prison, il n’est pas libéré dans un deal politique et ne devient plus jamais un danger pour notre peuple », a martelé Limor Son Har-Melech à la tribune, évoquant la mort de son mari Shuli, tué dans un attentat en 2003, et le fait que son meurtrier avait été libéré dans l’échange Shalit avant d’être abattu à Rafah.

Ben Gvir jubile : “La loi la plus morale d’Israël”

Le ministre Ben Gvir, qui a fait de cette mesure une bataille idéologique, a célébré un « moment historique ». « C’est la loi la plus morale, la plus juste, la plus correcte », a-t-il déclaré.

Et d’ajouter : « Chaque terroriste qui sort pour tuer un Juif doit savoir qu’il n’y a qu’une seule peine : la mort. »

Pour Ben Gvir, il s’agit d’une « réponse nécessaire au 7 octobre », une façon de dire que le pays doit désormais frapper fort et cesser d’avoir peur de la force de dissuasion.

Netanyahu se rallie – non sans calcul politique

Jusqu’à récemment, le Premier ministre Benyamin Netanyahu s’était montré réticent à soutenir une telle loi, craignant qu’elle ne complique les négociations pour la libération des otages détenus à Gaza.

Mais le coordinateur des otages, Gal Hirsch, a confirmé devant la commission de la Sécurité nationale que Netanyahu soutenait désormais le texte, estimant que les arguments sécuritaires précédents « n’étaient plus pertinents » depuis le retour des derniers otages vivants.

Hirsch a néanmoins plaidé pour que les services de sécurité puissent émettre un avis préalable avant toute exécution. Une clause immédiatement rejetée par Ben Gvir, qui y voit une tentative d’édulcoration du projet.

Beaucoup d’observateurs politiques à Jérusalem y voient un geste tactique du Premier ministre : en donnant satisfaction à Otzma Yehudit, il cherche à éviter une crise de coalition alors que Ben Gvir menace régulièrement de s’affranchir de la discipline gouvernementale.

La fracture religieuse : la “crainte du sang versé”

Contre toute attente, la principale opposition à droite vient du monde haredi. Le parti Degel HaTorah, sur instruction du grand rabbin Dov Landau, a voté contre la loi, invoquant un principe halakhique : la crainte du sang versé.

Selon cette interprétation, l’instauration de la peine de mort pourrait provoquer davantage de morts juifs, en exacerbant la haine et la vengeance, et serait donc contraire à la Torah.

Cette position a choqué une partie de l’opinion publique et des familles endeuillées, qui ont publié une lettre ouverte accusant les députés ultra-orthodoxes d’avoir « du sang sur les mains » et de s’être rendus complices des libérations de terroristes dans les précédents accords.

Une opposition farouche : “Une loi d’apartheid”

L’opposition laïque et arabe a unanimement rejeté le texte, le comparant à une législation « raciale et populiste ».

Ayman Odeh a dénoncé « une loi d’apartheid », tandis que Merav Michaeli (Parti travailliste) a accusé la coalition de “jouer avec le feu de la haine”.

« Israël a toujours été une démocratie de droit, pas un État de vengeance », a-t-elle déclaré.

De nombreux juristes, y compris au sein du ministère de la Justice, ont rappelé que la peine de mort existe déjà en Israël mais n’a été appliquée qu’une seule fois : contre Adolf Eichmann, en 1962. La loi actuelle viendrait faciliter son application en supprimant le consensus requis de tous les juges.

Une loi à haut risque

La proposition repart désormais en commission de la Constitution, du Droit et de la Justice, avant deux nouvelles lectures décisives.

Son adoption finale n’est pas garantie : plusieurs ministres, y compris dans le Likoud, jugent la loi dangereuse pour les relations internationales d’Israël, notamment avec les États-Unis et l’Union européenne.

Mais sur le plan intérieur, le message est clair : Israël change de ton.

Dans un pays encore traumatisé par le 7 octobre, l’heure n’est plus à la retenue, mais à la démonstration de force.

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