Quand Varsovie abritait la plus grande communauté juive d’Europe
La Pologne constituait jusqu’à la Deuxième Guerre l’un des plus grands foyers juifs au monde : 10% de la population totale du pays était rattachée à la minorité juive mais ce chiffre pouvait être trois fois supérieur dans les villes, par exemple Varsovie. Sur les traces de ce passé qui malgré les destructions refleurit peu à peu.
L’histoire juive de Varsovie est aussi ancienne que la présence des Juifs en Pologne et s’étale donc sur plus de mille ans. Elle connaît une longue période de tolérance religieuse et de prospérité avant un anéantissement presque complet causé par l’occupation nazie de la Pologne pendant la Deuxième Guerre mondiale.
La guerre froide a tenu dans l’ombre les relations polono-juives et le régime communiste polonais, comme d’autres « partis frères » du bloc de l’Est, a parfois attisé l’antisémitisme pour trouver un bouc émissaire aux crises politiques ou économiques qui affectaient le pays (voir l’article de Victor Roulet).
Ainsi, en réaction aux révoltes étudiantes du début de l’année 1968 qui dénoncent la censure, le pouvoir lance une intense campagne antisémite qui provoque l’exil forcé de près de quinze mille citoyens polonais d’origine juive.
Avec le retour de la démocratie, Varsovie renoue avec son riche passé juif et lui redonne une existence contemporaine, en particulier autour de la place Grzybowski. L’organisation d’événements culturels comme le festival de culture juive « Varsovie de Singer » fait non seulement revivre l’histoire juive de Varsovie mais contribue aussi à faire venir ou revenir d’anciens exilés et des personnes d’origine juive polonaise.
Palmier de dattes – rond-point de Gaulle
Bonjour de l’avenue de Jérusalem, ou plus simplement le Palmier de Joanna Rejkowska -
À Varsovie, les premières communautés juives permanentes répertoriées remontent au XVe siècle. Elles étaient installées dans la Vieille Ville, le long de la rue Juive (ulica Żydowska, n’existe plus aujourd’hui), et disposaient d’une synagogue. Toutefois, leur prospérité grandissante a suscité la jalousie des autres habitants qui forcèrent les autorités municipales à les repousser en dehors de la ville.
Les Juifs commencent donc à s’installer dans d’autres quartiers qui plus tard seront intégrées à la capitale, comme la Nouvelle Jérusalem. L’avenue de Jérusalem (aleje Jerozolimskie), de nos jours l’un des principaux axes de communication de Varsovie, témoigne de cette histoire, tout comme la présence au milieu du rond-point de Gaulle d’un palmier de dattes artificiel, installation artistique de Joanna Rejkowska qui porte le nom de « Bonjour de l’avenue de Jérusalem » et rappelle ceux que l’on peut voir en Israël.
Le mikvé de Praga
Les Juifs se sont également installés dans le quartier de Praga de Varsovie qui constituait jusqu’à 1791 une ville indépendante. Ils y possédaient sur la rue Kłopotowski une synagogue qui malheureusement a été détruite après la Deuxième Guerre mondiale. Le modeste bâtiment de forme circulaire avait été conçu par l’architecte Grzegorz Lessel et construit en 1835. Il n’en reste aujourd’hui qu’un square vide.
En revanche, le mikvé, bain consacré aux ablutions rituelles, a survécu. Son existence est attestée depuis au moins la première moitié du XIX siècle mais le bâtiment actuel d’allure élégante a été érigé entre 1910 et 1913 selon les plans de Naum Hornstein.
À la charnière du XVIIIe et du XIXe siècle, la communauté juive de Varsovie est institutionnalisée et obtient le droit de gérer son propre espace funéraire dans les frontières administratives d’alors de la ville. Le cimetière de la rue Okopowa, fondé en 1806, est l’un des plus grands cimetières juifs au monde avec près de cent mille tombes conservées et constitue l’une des rares cimetières juifs en Pologne encore en activité.
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