Julie Safirstein et les taches de couleur

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Julie Safirstein artiste peintre juive,

Julie Safirstein et les taches de couleur

Julie Safirstein met à mal les propensions de l’égo dont accouchent bassement trop d’artistes. Face à ceux qui se nient en expulsant toute possibilité de transfuge et de transe-fusion elle offre une familiarité contagieuse par l’empathie de ses œuvres qui relève un défi : donner corps aux mots et une lumière aussi mystique que sensorielle.

Beaucoup d’artistes avant elle ont tenté la même gageure et s’y cassant des dents.

Safirstein Julie artiste peintre et poète juive

Safirstein Julie artiste peintre et poète juive

Ils n’offraient aux textes des poètes que de pâles métaphores. Julie Safirstein se confronte à des auteurs majeurs : Gérard de Nerval, Boris Vian ou encore Djalâl-od-Dîn Rûmî - poète mystique de langue persane du XIIème siècle qui plus qu’un autre se méfiait des images : « L'œil de la perception est aussi limité que la paume de la mais qui ne peut cerner la totalité d’un éléphant » écrivait celui qui précisait « L’œil de la mer est une chose, l'écume en est une autre ; délaisse l'écume et regarde avec l’œil de la mer ».

L’artiste y parvient en sortant l’être de ses yeux aveuglés et répondant à un autre vœu du poète : « Nous nous heurtons les uns contre les autres comme des barques ; nos yeux sont aveuglés ; l'eau est pourtant claire. Ô toi qui t'es endormi dans le bateau du corps, tu as vu l'eau ; contemple l'Eau de l'eau ».

Julie Safirstein grâce à son art « premier » le propose à coups de taches monocolores vives.
De la contemplation elle passe à la métamorphose des mots eux-mêmes. Elle donne par ses peinture une autre dimension (et non un reflet) au langage des poètes dont elle comprend que la parole est un prétexte et que ce qui attire l'être vers l'être c’est l’affinité qui les lie, et non la parole.

Lui privilégiant l’image l’artiste tient ses promesses et donne des échos à des appels que les poètes eux-mêmes n’osent espérer. Remontant à des formes simples, profondes, colorées l’artiste exhume l’être de son état d’oubli et de détresse.

Détricotant les notions de figuration et d’abstraction elle donne présence à un secret qui se fomente entre la peinture et le poème, entre le réel et le surréel.

Les images de l’artiste ne tournent pas autour du poème : elles jouent avec lui, le pénètre en accordant un possible à l’innommable et l’invisible.

Face à la peur du poète qui craignait que le monde des mages reste infirme, Julie Safirstein en ressaisit les fleurs à peine décelables. Elles enveloppent le corps nu du poème, aspirées au centre du mouvement qu’elles créent. L’œil n’est plus noyé dans l’obscur. La peinture évolue entre ici et là-bas, aujourd’hui et hier.

Une intensité primaire la porte vers l’élan d’un face à face espéré avec tout ce qui reste d’espoir muet à l’être. Bref la beauté des images s’accordent à celle du poème. La peinture offre à celui-ci dans le présent et par delà les siècles des rhizomes et une préhension particulière.

Si bien que la jeune artiste accrédite ce qu'Edmond Jabès disait de la femme lorsqu’il la nomme dans Elya : « le rayon de la lumière divine ».

 

Les œuvres de Julie Safirstein sont publiées entre autres par Maeght Editeur, Paris.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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