
KI TAVO ARAMEEN, ERRANT ETAIT MON PERE
La sidra Ki Tavo contient les deux uniques prières explicitement instituées par la Torah. Il s’agit d’abord d’une déclaration de chaque pèlerin au moment où, dans le Temple, il remettait les prémices au Cohen, c’est-à-dire au prêtre.
Il est question ensuite d’une autre déclaration qu’on avait à faire chaque troisième année de récoltes, après le prélèvement et répartition de la dîme (Deut. 26,1.2 et 12-15). Bien qu’en l’absence du Sanctuaire de Jérusalem, ni l’un ni l’autre de ces textes ne soient plus récités selon la prescription, la déclaration du pèlerin remettant les prémices : « Arami ouvéd avi » a été adoptée dans notre Haggadah de Pessa’h
Celle-ci nous rend familier un texte qui, en diaspora, était pourtant destiné à s’effacer de nos mémoires.
Ce passage au début de notre lecture, est ambigu dans la mesure où il ne précise pas clairement si ce cérémonial se renouvelle chaque année au printemps ou s’il eut lieu une seule fois, à l’instant historique où les Enfants d’Israël prirent possession du pays de Canaan.
Quoi qu’il en soit, le passage qui nous est familier concerne justement l’histoire. En l’occurrence, il rappelle que notre ancêtre Abraham était un araméen errant.
En effet, Abraham était venu depuis Aram (la Mésopotamie) abandonnant son pays et sa famille. Selon d’autres commentateurs, l’araméen se rapporte à Jacob qui avait passé vingt années de son existence en Aram, chez Laban.
L’errance d’Abraham ou de Jacob n’était pas seulement physique et géographique, mais également spirituelle. Abraham avant de découvrir le monothéisme, Jacob au moment où il devait s’enfuir de chez Laban où il était confronté à nouveau à la civilisation idolâtre et où, par conséquent, les conditions étaient réunies pour que l’histoire d’Israël, à peine commencée, retombe dans ses premiers errements, D.ieu intervient pour les faire sortir de leur milieu et les conduire vers le pays de Canaan.
Dans ce cas, comme dans l’autre, mon Père n’était qu’un « araméen » perdu qui n’a rien hérité de son père. Il a dû descendre en Egypte en petit nombre et le voici devenu un grand peuple que l’Eternel a fait sortir de l’esclavage pour lui donner ce pays, riche en beaux fruits...
Le texte de notre sidra voulait nous enseigner qu’Israël doit avoir à l’esprit ce souvenir précis de son histoire. En quelques sortes, Israël, au moment de remercier D.ieu de toutes les grâces qu’il lui a accordées, rappelle sa condition lointaine et ses origines pour éviter tout orgueil, toute prétention . Notre extraction n’est pas meilleure que celle d’un autre peuple. L’élection a été accordée par D.ieu parce que nos ancêtres, qui n’étaient que des araméens errants, ont fait l’effort de découvrir D.ieu et de se rapprocher de Lui.
Ajoutons pour terminer cette remarque: pourquoi ce texte jouit-il d’une telle notoriété ? Parce que lors de la soirée pascale, nous nous interrogeons sur le sens de notre survie et de notre mission . Ce texte est là pour nous rappeler l’importance de notre passé. Nous ne sommes pas un peuple surgi de nulle part. Nous avons une responsabilité à l’égard de nos ancêtres dans le maintien et la transmission du judaïsme.
Claude LAYANI
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