
Merci à tous les artistes !
J'expliquais l'autre jour à mes enfants, en regardant les images du festival de Cannes, que les livres tout comme les films expriment la vie des gens, ce que nous savons si savamment cacher, et qu'au détour d'une plume trempée dans l'encre de la vie, ou d'une caméra fouineuse, chercheuse, certains savent, avec talent, révéler ce que nous sommes.
Imaginez un monde sans romans, sans films, un monde où la vie de chacun ne serait que l'enveloppe d'une lettre refusant de se décacheter, nous passeront notre vie, à côté de ces enveloppes, à côté de nous mêmes.
Le talent de l'artiste est de révéler l'intérieur de ces vies, de ces enveloppes , qui plus est, de nous révéler ce que nous sommes, avec cette pudeur extrême de ne pas nous montrer du doigt...
Avec l'espoir assez fou, d'espérer qu'un jour, un jour de folie, sans l'aide de caméras, ni de ces mots qui s'empilent, s'enfilent, s'enfuient, se mentent souvent... au gré de notes, musique, pages, nous puissions à notre tour paraître enfin ce que nous sommes.
Notre souffrance vient de cette incroyable résistance à vouloir montrer autre chose que nous même.
Cette énergie si puissante utilisée à cacher ce qui nous fait souffrir, pour fuir le regard de l'autre, de sa compassion, si éphémère, de celui qui juge, au nom de cette moralité, qui devrait nous aider à vivre...
Mais lorsque nous ne répondons plus à cette morale, que fait-on ?
Quel exécutoire peut on avoir pour exister sans souffrir ?
Alors à notre portée, Dieu à prévu, le verbe , le verbe Créateur.
Finalement, quel terrible cri que celui du cinéaste, du romancier, du peintre, de tous ces artistes, qui choisissent leur propre langage pour exprimer ce qu'ils ressentent, ce qu'ils savent, parce qu'ils ne trouvent pas les mots, et pour sortir de ce silence, prisonniers de leur vérité, de leurs émotions, ils recherchent dèsespérement l'émotion de l'autre pour s'en libérer.
Et nous, nous nous reconnaissons dans cet écran de lumière, ce projecteur finalement posé sur nous, où nos rires comme nos larmes, nos applaudissement comme nos bravos, ne sont qu'un immense merci à ces artistes, qui ont su dire ce que nous n'osons peut-être pas même penser.
Être exhibitionniste de sa vie, à défaut d'en être maître.
Claudine Douillet
Billet écrit pour Alliance en 2005
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