Lattaquié, la surprise stratégique : la France entre en Syrie, Israël sous pression

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Lattaquié, la surprise stratégique : la France entre en Syrie, Israël sous pression

Lattaquié, la surprise stratégique : la France entre en Syrie, Israël sous pression

Par AllianceMai 2025

Un contrat discret, signé au cœur d’un Moyen-Orient en recomposition, pourrait bien devenir l’une des plus importantes manœuvres géopolitiques de la décennie.
La France, par l’intermédiaire de la compagnie maritime CMA CGM, a obtenu la gestion du port syrien de Lattaquié pour une durée de 30 ans, moyennant 230 millions d’euros. Derrière ce simple accord logistique se cache une stratégie aux ramifications profondes : affaiblissement de la Russie, repositionnement de l’Europe face aux États-Unis, encerclement diplomatique d’Israël, et nouvel élan pour la reconstruction syrienne.

Un changement de régime, une opportunité française

Le contexte est clé.
Depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre 2024 et l’arrivée au pouvoir du président intérimaire Ahmed al-Charaa, la Syrie cherche à redorer son image internationale et à attirer des capitaux étrangers. En s’engageant sur le terrain économique, la France réalise un double coup : s’ancrer durablement dans la région tout en détrônant la Russie de l’un de ses bastions méditerranéens.

Lattaquié était jusqu’alors une pièce maîtresse du dispositif militaire russe en Syrie, un port d’attache stratégique pour ses opérations au Levant.
En s’emparant de sa gestion, la France coupe une artère logistique à Moscou, affaiblissant indirectement sa capacité d’intervention, y compris en Ukraine. Pour l’Élysée, l’opération est claire : reprendre pied dans une région où Washington dominait jusqu’alors la scène diplomatique.

Israël encerclé, vulnérabilité accrue

Mais pour Jérusalem, l’accord sonne comme une alerte. Israël, qui opérait jusqu’ici presque librement dans le ciel syrien avec la bénédiction tacite de la Russie, pourrait voir son espace d’action réduit, voire surveillé, si la France impose ses propres lignes rouges.

Le port de Lattaquié est un nœud stratégique. Modernisé sous supervision française, il pourrait servir de plaque tournante pour les intérêts qataris, iraniens ou turcs, compliquant encore davantage les opérations de renseignement et de frappe israéliennes.
Une éventuelle militarisation indirecte du site, sous couvert d’une présence occidentale, fragiliserait le flanc nord d’Israël, déjà exposé au Liban et au Hezbollah.

De plus, la volonté française de faciliter le retour des réfugiés syriens depuis le Liban – un geste salué à Beyrouth – pourrait stabiliser une Syrie hostile, mais plus autonome, et donc potentiellement plus offensive face à Israël.

L’Europe s’émancipe, la fracture avec les États-Unis s’accentue

Derrière ce dossier syrien, c’est une autre dynamique qui s’esquisse : l’émancipation stratégique de l’Europe vis-à-vis des États-Unis.
En investissant dans un port syrien, la France trace une nouvelle route vers l’Asie, indépendante des corridors sous influence américaine.
L’objectif : favoriser l’acheminement du gaz qatari – concurrent direct du gaz américain – vers l’Europe, via le Liban et la Syrie.

C’est une revanche feutrée contre Donald Trump, résolu à renforcer l’unilatéralisme américain. Le message français est clair : l’Europe peut jouer sa propre partition, en s’appuyant sur ses champions industriels et sur une diplomatie économique agressive, même sur les terres historiquement réservées à Moscou et à Washington.

Vers une recomposition du Moyen-Orient ?

Les cartes sont redistribuées. Le pouvoir syrien renaît sous un nouveau visage, la Russie recule, la France avance, et Israël, malgré sa puissance militaire, doit naviguer dans une zone d’influence de plus en plus hostile et structurée. L’Europe, pour sa part, prend le risque de s’impliquer directement dans une région où l’ambiguïté était jusqu’ici son meilleur atout.

L’histoire jugera si cette initiative fut visionnaire ou dangereuse. Mais une chose est sûre : Lattaquié n’est plus une simple ville côtière. C’est un tournant.

Ahmed al-Sharaa, président intérimaire de la Syrie depuis janvier 2025, est une figure controversée dont le passé soulève des inquiétudes quant à la stabilité régionale, notamment pour Israël.

Un parcours marqué par l’extrémisme

Né en 1982 à Riyad, en Arabie saoudite, Ahmed al-Sharaa, connu sous le nom de guerre Abu Mohammad al-Jolani, a été un membre actif d’Al-Qaïda en Irak avant de fonder le Front al-Nosra en Syrie, affilié à Al-Qaïda. En 2016, il a rompu avec Al-Qaïda pour créer Hayat Tahrir al-Sham (HTS), qui a joué un rôle central dans la chute du régime de Bachar al-Assad en décembre 2024. Malgré ses déclarations de renoncement à l’extrémisme, son passé suscite des doutes quant à ses intentions réelles.

Implications pour Israël

L’arrivée au pouvoir d’al-Sharaa représente une source d’incertitude pour Israël. Bien que le président syrien ait exprimé le souhait d’éviter une escalade avec Israël, des tensions subsistent, notamment après une frappe israélienne près du palais présidentiel à Damas. La présence d’un ancien chef jihadiste à la tête de la Syrie pourrait compliquer les relations bilatérales et accroître les risques de confrontation.

Conséquences pour l’Europe face aux États-Unis

L’accord stratégique entre la France et la Syrie, confiant à CMA CGM la gestion du port de Lattaquié pour 30 ans, s’inscrit dans une volonté européenne de renforcer son influence au Moyen-Orient.
Ce partenariat offre à l’Europe une alternative aux routes commerciales dominées par les États-Unis et pourrait faciliter l’acheminement du gaz qatari vers le continent. Toutefois, cette initiative pourrait également créer des frictions avec Washington, qui demeure méfiant envers le nouveau régime syrien.


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