Article paru dans " le monde",le 25/08/08
Fanny Mikey, actrice et figure du théâtre colombien, est morte, samedi 16 août, à Cali (Colombie), à l'âge de 78 ans.
Fille d'un juif lituanien émigré en Argentine, Fanny Elisa Mikey Orlanzky est née à Buenos Aires, le 26 décembre 1929. Dans son pays d'origine, elle prend des cours d'interprétation et débute sur scène à Buenos Aires, contre la volonté de sa famille.
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En 1959, Fanny Mikey suit l'acteur Pedro Martinez en Colombie, dont elle prendra la nationalité. Elle travaille d'abord avec Enrique Buenaventura au Théâtre expérimental de Cali (TEC), qui mêle leçons de Brecht et inspiration tropicale. La comédienne montre son talent d'organisatrice à la tête du Festival d'art de Cali, qui contribue à l'effervescence de la troisième ville du pays.
Après 1967, elle rejoint le Théâtre populaire de Bogota, et collabore avec le dramaturge Jorge Ali Triana, dont elle produira plus tard les films Edipo Alcalde (1996), sélectionné au Festival de Cannes, et Bolivar soy yo (2002).
Puis elle lance le premier café-concert colombien, La Gata Caliente. En 1981, elle fonde le Théâtre national, en vue d'élargir le public vers la nouvelle classe moyenne. Alors qu'une partie de l'opinion intellectuelle déplore sa veine "commerciale", Fanny Mikey tient son pari et ouvre un deuxième théâtre, La Castellana, puis une école, la Maison du théâtre national, dans les murs de l'ancienne synagogue du quartier de Teusaquillo.
Cette femme libre, à la silhouette élancée, à l'abondante chevelure rousse et à la voix grave, interprète avec la même conviction Qui a peur de Virginia Wolf ?, d'Edward Albee, et Un tramway nommé désir, de Tennessee Williams, La Folle de Chaillot, de Giraudoux, et une évocation de Maria Callas.
Elle se lance en 1988 dans une aventure inédite, le Festival ibéro-américain de théâtre de Bogota. Malgré son intitulé, le festival présente des oeuvres des cinq continents. L'édition de mars 2008 a attiré 3,3 millions de spectateurs, dont près d'un demi-million dans les salles.
Son dernier spectacle, Parfum de banlieue et tango, montre un attachement à ses origines argentines que l'engagement pour la Colombie n'a jamais étouffé. La création est le meilleur antidote contre la culture de la violence, croyait-elle. Une utopie qu'elle a su incarner avec une énergie contagieuse.