Pourim raconté par Isaac pougatch et Elie Wiesel

Culture, Judaïsme, Paracha de la semaine - le - par .
Transférer à un amiImprimerCommenterAgrandir le texteRéduire le texte
FacebookTwitterGoogle+LinkedInPinterest
Méguilat d'esther pour pourim

P O U R I M raconté par Isaac Pougatch et Elie Wiesel

Méguilat d'esther pour pourim

Méguilat d'esther pour pourim

Nous avons choisi deux auteurs qui rappellent avec nostalgie la célébration de la fête de Pourim dans leur village respectif.

Dans son livre de souvenirs : « A l’écoute de mon peuple » paru chez Albin Michel, Isaac Pougatch décrit ce qu’était la journée de Pourim à Braguine. Voici ce bref extrait:

« Pourim: la victoire de Mardochée le juste sur l’infâme Haman. Cadeau de fin d’hiver fort apprécié par les Juifs de la bourgade. Qu’importe que l’événement commémoré se fût passé dans la vague et lointaine Perse aux alentours du 6e siècle avant notre ère.

Au Shtettl, la jubilation était grande. Mardochée et Haman ne s’affrontent-ils pas dans tous les siècles ? Et Haman n’était-il pas un descendant de ce perfide Amalec qui avait attaqué les Hébreux dans le désert, alors que ceux-ci se dirigeaient vers la Terre Promise ? Comme son bisaïeul, il a été foudroyé, victime de son stupide orgueil. Pensez donc ! Obliger Mardochée à plier le genou devant un simple mortel, alors que le peuple juif ne s’agenouillait que devant D.ieu... Et ses intrigues donc ! Ses calomnies visant, au départ, le seul Mardochée pour s’étendre bien vite à l’ensemble de la population juive dont finalement il jura la perte... Tout cela n’était que trop connu, trop familier au shtettl. Cela avait un relent d’actualité. Pour s’en convaincre, il suffisait d’entendre les récits des rares voyageurs qui lisaient les journaux de Moscou, de Saint Petersbourg et de Kiev...

A Pourim, on ne chômait pas, mais qui donc avait le coeur à l’ouvrage - et même à l’étude - le jour où l’on avait échappé à un tel pogrome ? On donnait aux pauvres, on s’envoyait des gourmandises (toujours les mêmes) essentiellement pourimesques: gâteaux triangulaires farcis de graines de pavot ou de confiture, amandes et noisettes au miel en formes de losanges.

Le soir clôturant la fête, on ne manquait pas, dans chaque demeure, de faire honneur au festin qui rappelait celui dont s’étaient régalés les juifs de Perse, une fois le danger écarté. Des groupes de jeunes gens, improvisés comédiens, attifés de costumes qui se voulaient bibliques, allaient de maison en maison, distraire les convives en reconstituant des épisodes de la Genèse, tels le sacrifice d’Abraham ou Joseph vendu par ses frères... Comme on le voit, la célébration de tels événements du passé ne faisait guère oublier tous les autres...

Pour Elie Wiesel, ce thème de Pourim est le sujet de son livre « Le procès de Shamgorod » tel qu’il se déroula le 25 février 1649.

Le procès de Shamgorod d'Elie Wiesel

Le procès de Shamgorod d'Elie Wiesel

Il s’agit d’une pièce de théâtre, de ce que l’on appelle plus exactement un « Pourim shpil ».

Ouvrons une petite parenthèse pour expliquer exactement ce qu’est le Pourim shpil ou le carnaval juif.

A l’origine du théâtre juif, il y a la tradition des Pourim shpil, ces pièces interprétées durant la fête des Sorts qui remémore le sauvetage des Juifs par la reine Esther au temps du roi perse Assuérus.Pourim, c’est le carnaval juif ,marqué par le rire, le déguisement et la dérision.

Un des temps forts de cette fête reste la représentation du Jeu de Pourim dans lequel s’entremêlent une dimension religieuse - il s’agit d’un prolongement en langue yiddish de la liturgie - théâtrale - c’est une mise en scène du texte sacré - et carnavalesque - nous sommes dans le monde de la farce burlesque et de la parole à la manière de la Commedia dell’arte. Le Pourim shpil permet de comprendre ce que fut la culture « populaire » comique juive.

Revenons à Elie Wiesel: « En ce jour de Pourim donc, trois comédiens ambulants s’installent à l’auberge pour divertir la communauté. Pourim, c’est la fête où les fous sont couronnés, où les enfants et les mendiants sont rois. Fête des masques, où tout le monde aspire au changement. La fête du non-savoir. La tradition ne dit-elle pas qu’il faut boire et boire encore « jusqu’à en perdre la conscience et la connaissance, jusqu’à ne plus être capable de distinguer entre le bien et le mal, entre Mardochée le juste et Haman l’impie, entre la lumière et l’ombre, entre la vie et le trépas »

.....Quand je pense à la fête de Pourim, je pense aux masques que nous portions. Nous étions des enfants dans notre petite ville et, à Pourim, l’on jouait. On allait de porte à porte ramasser de l’argent pour les pauvres... J’ai réfléchi à Pourim surtout plus tard, quand j’ai commencé à me poser des questions sur le sens des miracles et sur la nécessité des fêtes dans le judaïsme.

C’était jadis une fête très joyeuse. Aujourd’hui, on ne sait plus ce qu’est la joie. Dans mon enfance, c’était une mitsva de se saouler. La parole de la tradition qui veut qu’à la fin des temps, seule demeure la fête de Pourim est, me semble-t-il, une ironie.

C’est l’humour du judaïsme qui veut ainsi mettre l’accent sur le rire, lequel occupe une place importante dans notre pensée et dans notre histoire. C’est comme si nous disons que, lorsque le Messie viendra, il rira avec nous »

Laissons Pourim à sa juste place, c’est un festin ambigu, une bataille gagnée, mais pas une guerre gagnée, c’est une victoire provisoire des forces de la vie contre les forces de la mort.

Claude Layani

Vos réactions

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

A voir aussi