
Voilà deux jours désormais que les combats entre les groupes armés de Gaza et Israël se sont achevés. Un cessez-le-feu illimité a été signé. Mais les principaux points de divergence entre les deux camps doivent encore faire l'objet de prochaines négociations prévues dans un délai d'un mois. Si les armes se sont tues, le conflit est donc encore loin d'être réglé. Israël n'a pas obtenu la démilitarisation de l'enclave palestinienne ni concédé la fin du blocus.
Cette fin de conflit ressemble beaucoup à un statu quo. Et cela suscite de nombreuses critiques côté israélien. À tel point que beaucoup parient sur des élections anticipées, que des sondages tendent à accréditer. Car la chute de Benyamin Netanyahu y est vertigineuse. Une étude publiée ce jeudi matin l'estimait à quasiment 30 points. Seuls 50 % des Israéliens s'y disaient satisfaits de la façon dont il a mené l'opération militaire. Ils étaient 77 % encore au début du mois d'août. Et d'autres sondages marquent une chute encore plus importante.
Dans une allocution télévisée mercredi 27 août au soir, Benyamin Netanyahu a donc insisté sur le fait qu'Israël n'avait rien cédé au Hamas. Pas de construction de port ni d'aéroport, pas d'échange de prisonniers non plus. Le Premier ministre a voulu montrer que « Bordure protectrice » était un succès pour l'État hébreu, un avis que ne partagent que 26 % de ses concitoyens, selon le sondage évoqué précédemment, alors qu'ils sont 54 % à considérer qu'aucune des parties n'est sortie vainqueur de ce conflit.
Une coalition divisée
Ces divergences dans les sondages éclatent aussi au sein même de la coalition gouvernementale. Durant le conflit déjà, les partis les plus à droite de sa coalition, comme Israël Beitenou d'Avigdor Lieberman ou Le Foyer juif de Naftali Bennett, prônaient une position plus radicale pour finalement se débarrasser totalement du Hamas à Gaza. Au moment où ce cessez-le-feu définitif est venu sur la table, Benyamin Netanyahu ne l'a pas soumis au vote du cabinet de sécurité. Le Likoud se fait fort de rappeler qu'il n'avait pas besoin de son aval. Mais si Benyamin Netanyahu n'a pas sollicité de vote, c'est surtout parce qu'il n'aurait pas obtenu la majorité. Ce qui alimente les suspicions d'élections anticipées.
Si de telles élections signifieraient forcément la fin du gouvernement actuel, elles ne seraient pas forcément le plus mauvais des scénarii pour le Premier ministre. Car même s’il a chuté dans les sondages, il n’a que peu de concurrents d’envergure. La gauche n'a pas de chef charismatique et c'est finalement sur sa droite qu'il est le plus menacé. Naftali Bennett, chef du parti Le Foyer juif et actuel ministre de l'Industrie, de l'Artisanat et de l'Emploi a vu sa cote de popularité grimper en flèche. Aujourd'hui, les sondages lui accordent 19 sièges à la Knesset, plaçant son parti en deuxième force politique du pays derrière le Likoud de Netanyahu. L'autre chef de file de l'extrême droite, Avigdor Lieberman, le ministre des Affaires étrangères, lui, rassemble moins. Il est perçu comme plus louvoyant, changeant de position au fil du temps. À l'inverse, Naftali Bennett fait figure d'homme droit dans ses bottes.
Vers une droitisation de la politique israélienne ?
S’il est toujours difficile d’établir des pronostics en matière politique - et en Israël peut-être plus qu’ailleurs -, on peut s’attendre à une droitisation de la vie politique israélienne. Certains observateurs israéliens estiment que ces 50 jours de guerre marquent l'échec de la politique d'échange de territoire contre la paix, les Israéliens s'étant retirés de Gaza en 2005. Du coup, selon eux, cela renforce dans l'opinion publique l'idée qu'il faut être ferme face aux Palestiniens et cela affaiblit le camp plus modéré – le centre et la gauche.
Ce scénario d’une droitisation ne fait cependant pas l’unanimité. D'autres soulignent qu'aujourd'hui, Benyamin Netanyahu a rompu avec une partie de la droite qui aurait voulu le voir frapper plus fort le Hamas. Dans cette droite-là, on retrouve l'extrême droite, mais aussi une partie du Likoud. Et s'il perd le soutien du Likoud, Benyamin Netanyahu pourrait alors vouloir copier Ariel Sharon. L'ex-Premier ministre, venu du Likoud lui aussi, avait créé - après le retrait de Gaza - son propre parti : Kadima, se positionnant au centre de l'échiquier politique.
Mais aujourd'hui, Kadima a quasiment disparu. Alors est-ce de nature à refroidir les éventuelles velléités sécessionnistes de Netanyahu ? Possible. En tout cas, tout le monde s'accorde sur le fait que ce conflit mènera à une réorganisation de l'échiquier politique.
Source RFI