Je m'appelle Elie Rofé, je suis metteur en scène et nous jouons actuellement une pièce à la comédie nation qui est un biopic du dramaturge Odon Von Horváth.

On traverse pendant 1h15 sa vie tumultueuse, ses combats contre la montée du nationalisme et du nazisme et son histoire d'amour pour Hertha Pauli, une jeune actrice Allemande. Nous jouons tous les vendredis à 19h et les samedis à 18h30 jusqu'au 20 novembre.

Ödön Von Horváth

Ödön Von Horváth naît le 9 décembre 1901 à Fiume.

« Je n’ai pas de pays natal et bien entendu je n’en souffre aucunement. Je me réjouis au contraire de ce manque d’enracinement, car il me libère d’une sentimentalité inutile » Ödön Von Horváth

Fils de diplomate, il voyage très jeune dans toute l’Europe, expliquant ainsi sa vision altermondialiste bien loin des tendances nationalistes de l’époque.

C’est en Allemagne qu’il finira par s’installer au début des années 20, face à la montée du NSDAP il commence à prévenir du danger fasciste à travers ses oeuvres, connaissant à la fois un succès grandissant et des menaces de plus en plus fréquentes.

En 1929, il va rencontrer Hitler et se battre avec son groupe lors d’une réunion politique, il témoignera dans un procès tumultueux et s’attirera définitivement la haine des nationalistes.

En 1932 il obtient Le Prix Kleist, plus haute distinction littéraire d’Allemagne pour sa pièce Légendes de la forêt viennoise.

Ce qui n’empêchera pas le terrible autodafé de 1933 détruisant de nombreux ouvrages de Horváth.

En 1936 Horváth est contraint de fuir et d’écrire en exil, il voyage alors dans toute l’Europe et continue de publier des pièces dénonçant sans détour le danger nazi.

• De passage à Amsterdam il y rencontre une gitane qui lui prédit qu’un séjour à Paris sera décisif.
• En 1938 il finira par arriver à Paris et y retrouvera son ancienne amante Hertha Pauli. Une rencontre est organisé avec le réalisateur Robert Siodmak qui lui propose une adaptation au cinéma d’un de ses romans.

Un voyage vers les Etats-Unis se prépare mais Horváth n’y participera pas.

Son histoire se termine le 26 mai 1938 sur les Champs-Elysées devant le Théâtre Marigny, d’une mort étrangement cynique, rappelant douloureusement le ton de ses oeuvres.

Extrait du texte

Horváth : Je suis écrivain. J’avais du potentiel, et je ne suis pas encore vieux mais entre-temps... beaucoup de choses ont changé.

La clandestine : Ça gagne pas des masses écrivain.

Horváth : Et non, je n’ai plus qu’une vieille machine à écrire et un carnet sur moi, rien de plus… Enfin peut-être un ou deux manuscrits inachevés... La clandestine : Désolé, je n’ai jamais appris à lire. Juste à compter, c’était plus important.

Horváth : Ce n’est pas grave. De toutes manières mes œuvres sont mauvaises.

La clandestine : Pourquoi vous dites ça ?

Horváth : C’est la vérité. Elles n’ont pas servi à grand chose… Je n’ai pas le talent que j’aurai aimé avoir.

La clandestine : Peut-être que vous avez le talent du travail… Comme Van Gogh !

Horváth : Van Gogh ?

La clandestine : Oui, je l’aime beaucoup ! C’est un grand monsieur. Il travaillait beaucoup mais il était seul et malheureux, et fou ... Il est mort et maintenant tout le monde parle de lui.

Horváth : C’est très rassurant ce que vous dites là…

La clandestine : Mais les gens n’aimaient pas ce que vous faisiez ?

Horváth : Non. Beaucoup disaient que j’écrivais de la parodie, que mes œuvres étaient trop cruelles, trop méchantes, trop monstrueuses alors que…

La clandestine: Alors que quoi ?

Horváth : Alors que ma seule envie était de décrire le monde... tel qu’il est.

Temps de silence.

La clandestine : Je suis sûr que moi, j’aurai aimé vous lire.

Horváth : Merci.

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