
Chronique « Pluralités de femmes singulières » : « Je nage donc je suis »
Florence FLOURAC défie le temps par le mouvement. Sous la plume d’Alexandre BLONDIN
Son nom et prénom résonnent comme une victoire et des victoires, elle en a remporté au fil de l’eau…
Florence FLOURAC, partage sa vie entre une indispensable fusion affective familiale (elle est maman de 2 fils de 26 et 35 ans, sportifs également) et sa passion pour la natation, son sport de prédilection.
Sans artifices, elle ne cache pas son âge et à bientôt 59 ans, cette amazone des temps modernes défie le temps par le mouvement. Un engagement physique et mental de chaque jour.
La championne mais aussi la femme, nous résume une carrière qui lui semble si naturelle et qui est pourtant exemplaire à l’image de sa fantaisie et de son humilité pour évoquer cette incommensurable passion qui permet à la femme de se surpasser et de s’épanouir dans la performance d’être et d’exister !
Rencontre avec une enfant de l’eau
Tout commence à Thonon-Les-Bains, capitale Chablaisienne, sur les bords du Lac Léman. Florence et son jeune frère Franck fréquente régulièrement la plage municipale et sa piscine olympique comme bon nombre d’enfants de leur âge. Leur père qui les accompagne, est un jour interpellé par l’entraîneur du club local qui a remarqué l’aisance aquatique de ses enfants et lui demande s’ils voudraient bien rejoindre le club.
La réponse ne se fait pas attendre « Écoutez, ils sont en âge de comprendre, allez leur demander directement, s’ils veulent ou pas s’inscrire au club, ce sont eux les premiers concernés. »
Comme se souvient Florence
" On a fait une séance, c’était ludique et on s’est dit pourquoi pas ?"
Puis l’ambiance, les copains, on a commencé à prendre nos marques et à réaliser quelques jolies performances. Je n’avais que 6 ans et à 7 ans je remportais ma première médaille !
La plongée dans le grand bain de la compétition viendra avec l’enchaînement des saisons, puisque le Club des Nageurs de Thonon (CNT) n’était qu’un club d’été qui fonctionnait de mai à septembre et ne disposait pas de bassin couvert.
A 14 ans, Florence FLOURAC est déjà une nageuse de niveau régional et une valeur montante dans le milieu de la natation haut-savoyarde où pointe déjà quelques éléments prometteurs dont une certaine Catherine PLEWINSKI qui deviendra quelques années double médaillée olympique !
AB : Si vous deviez vous présenter en 3 adjectifs ?
FF : « Je dirais que je suis une nageuse passionnée, une sportive courageuse et une femme têtue. Demandez à ceux qui me connaissent. »
AB : Vous partagez votre vie professionnelle et sportive entre les lignes, et vous pratiquez la natation sportive depuis toujours. Comment gérer vous ces activités parallèles avec votre vie personnelle ?
FF : « Tout est toujours question d’équilibre et d’organisation. Mon poste actuel est celui de responsable du Sport Santé à La Cité de l’Eau dans la commune de Publier située entre Thonon et Évian.
Mon travail est d’apprendre à nager et de gérer des cours d’aquagym mais aussi des activités complémentaires et qui ne sont pas obligatoirement natatoires.
J’ai la chance de pouvoir exercer professionnellement dans une piscine, je peux donc ainsi profiter pleinement de mon sport dans un environnement qui lui est dédié.
C’est une facilité et un confort d’entrainement appréciable. Lorsque j’ai une coupure dans mon planning, je n’ai qu’à me changer et à plonger dans l’eau pour faire mes longueurs… C’est sans doute cela la clé de la bonne gestion du triptyque profession, sport et vie privée, que j’assume parfaitement. »
AB : On connaît les exigences liées à la pratique d’un sport de haut-niveau. Pensez-vous avoir sacrifié votre vie de femme au service du sport ?
« Je ne dirais pas cela car j’ai toujours su faire la part des choses. Ma famille, mes proches et mes amis, ont une place essentielle dans ma vie et dans mon cœur. Je pense qu’ils sont aussi le moteur de mes performances et de mon envie d’aller toujours et encore plus loin. Avec toute ma tendresse je les remercie pour leur accompagnement de chaque jour. »
AB : Pratiquez-vous d’autres sports ?
FF : « Oui, pour ne pas saturer et garder aussi la tête hors de l’eau ! je pratique d’autres disciplines comme la randonnée, la course à pied, l’escalade parfois et le skating (ski de fond), là aussi j’ai la chance de vivre dans une région magnifique entre lac et montagnes où les stations de sports d’hiver sont légion.
Pour le mental, rien de tel que le golf, sport qui demande de la précision, de la concentration et de la technicité. C’est un sport qui même lorsque vous atteignez un certain niveau, ne vous mets pas à l’abri d’un mauvais score. Les contre-performances sont plus difficiles qu’en natation, ce qui forge le mental à savoir gérer son stress.
Là aussi je bénéficie à quelques kilomètres d’un magnifique parcours 18 trous (l’un des plus beaux d’Europe !) qui se situe à Évian et domine le lac. »
AB : Comment êtes-vous passé de la natation course à la natation masters ? Quel en a été le déclic ?
FF : « J’ai arrêté la compétition à l’âge de 24 ans après le Championnat de France de natation universitaire. J’avais besoin de décompresser, de lâcher prise en faisant un break et il y avait aussi l’arrivée de mon premier enfant et mes responsabilités de maman.
J’ai ensuite repris en catégorie master l’année de mes 40 ans grâce à un nageur Michel GUILLEMIN qui m’a demandé si je souhaitais revenir nager.
Je me suis donc inscrite aux Championnats de France masters et fait un deal avec Michel en lui disant que si je remportais une médaille, je replongerais dans le grand bain ! et je l’ai gagné ce podium qui m’a conduit à reprendre les entraînements que j’avais délaissé depuis 16 longues années… Tout s’est alors enchaîné, la machine s’est remise en marche progressivement avec le plaisir de nager, des performances et du dépassement de soi. »
AB : Quels sont vos plus belles rencontres et vos meilleurs souvenirs ?
FF : Il y en a forcément beaucoup et je ne voudrais blesser personne, tous ceux que j’ai rencontré dans le milieu aquatique mériterait une citation. La confiance que m’a accordée à l’époque Mme. LEGRAND, entraîneur du club d’Annemasse Natation qui avait l’exigence et l’analyse de décerner le potentiel physique et mental des nageurs.
Puis aussi Patricia QUINT venue en stage à Thonon avec le club de Villiers-Le-Bel qui m’avait remarquée et incitée à faire le stage avec son équipe.
Sans oublier les stages de perfectionnement avec l’entraîneur de renom Marc BEGOTTI, puis en section master avec le double champion olympique Alain BERNARD.
Parmi mes meilleurs souvenirs, les voyages, l’ambiance d’équipe, le plaisir collectif de la performance et du dépassement de soi, sont autant de joies partagées.
Sur le plan des résultats, ma participation aux Championnats du monde masters 2008 à Perth en Australie a été une merveilleuse aventure sportive et touristique, avoir été classée 9e nageuse de ma catégorie sur 100m dos aux championnats d’Europe masters 2009 à Cadix en Espagne, j’avais alors 45 ans sont des instants magiques gravés pour toujours dans ma mémoire. Si adolescente, on m’avait dit qu’un jour… je participerais à des championnats européens et mondiaux de natation master, je ne l’aurais jamais imaginé. Il suffit parfois de croire à ses rêves d’enfant pour qu’ils se réalisent, à tout moment la vie nous réserve de belles surprises. »
AB : Vers qui se tourne votre regard et votre admiration parmi les grands champions ?
FF : Alexander POPOV, surnommé « la fusée russe » pour son charisme, son mental et ses performances, malgré les difficiles conditions d’entraînement qu’il a pu rencontrer à l’époque. L’impressionnant Michael PHELPS, nageur le plus titré de l’histoire et dont on ignore s’il sera un jour égalé.
Côté féminin, la suédoise Thérèse ALSHAMMAR et cette faculté de performé dans la longévité au plus haut niveau mondial. Elle a été finaliste olympique à 35 ans, sur 50m nage libre, un exploit unique en natation ! »
Une championne teintée d’humour
Ne vous fiez pas aux apparences, derrière la personnalité marquante de la nageuse à la parfaite morphologie sportive et au mental de fer, se cache une femme sensible, sincère, qui a beaucoup d’humour.
Si elle peut être drôle hors du bassin, elle est aussi une redoutable adversaire dans les lignes d’eau et brille sur les nombreux podiums des compétitions masters régionales, nationales et internationales.
Tous ses amis vous le diront à l’unanimité, Florence n’est pas la dernière pour la rigolade…
Elle est même un boute-en-train qui amuse la galerie avec des grimaces et des pitreries restées dans les annales des compétitions masters auxquelles elle a participé aux quatre coins de l’hexagone, en Europe et même jusqu’en Australie !
À son palmarès, pas moins de 78 médailles nationales à son actif et une 9e place au niveau européen en natation master. Un titre de championne de France master 2019 d’Aquathlon (épreuve de natation et de course à pied)
Florence FLOURAC est une nageuse complète en natation course et en eau libre.
Elle est licenciée au club master du Cercle des Nageurs de Thonon son club de toujours. Elle a également été pendant de nombreuses années membre de la section master du club Mont-Blanc Natation à Chamonix.
Elle excelle techniquement dans les 4 nages avec une aisance particulière en dos et en nage libre, ses épreuves favorites. Sprinteuse mais pas que, car de nature aventurière, elle n’hésite pas à s’aligner sur des épreuves de fond, de demi-fond et de longues traversées en eau libre. L’eau est son élément et elle s’essaie dans toutes les épreuves de natation avec très souvent de brillants résultats.
Tout cela grâce à une hygiène de vie et quelques sacrifices maîtrisés, pour être en phase avec une discipline sportive exigeante, une école de la vie qui apprend la rigueur, le dépassement de soi, le respect et la gestion de ses émotions.
« Je nage donc je suis, pour encore et toujours aller plus loin… »
Florence FLOURAC, femme libre, active et épanouie entretient par la pratique du sport cette source d’énergie indispensable à la mouvance du corps et de l’esprit.
Alexandre BLONDIN
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