Le Dr Naomi Halbert-Landau : Le Hamas a utilisé le viol pour briser toute la communauté israélienne

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Le Dr Naomi Halbert-Landau

Le Hamas a utilisé le viol pour briser toute la communauté israélienne.
Le 7 octobre, le Hamas a frappé Israël avec une violence inouïe, mais au-delà des pertes humaines, une arme plus insidieuse a été utilisée : le viol, visant à détruire l’essence même de la communauté israélienne. Le Dr Naomi Halbert-Landau, experte en violences sexuelles et génocides, éclaire cette stratégie dévastatrice qui, au-delà des corps, s’attaque aux fondements sociaux et patriarcaux du pays.

Le Dr Naomi Halbert-Landau est une figure unique : à la fois chercheuse féministe spécialisée dans les questions de genre, femme religieuse portant un foulard, et qui milite contre la violence des colons.

Elle étudie depuis des années la violence sexuelle dans le cadre des génocides, du Rwanda à la Bosnie, et elle explique aujourd'hui pourquoi les événements du 7 octobre nous obligent à lutter non seulement contre les terroristes, mais également contre le patriarcat dans son ensemble.

Quand les premiers rapports ont fait état d'une deuxième vague de pillards le 7 octobre, qu'avez-vous pensé ?

"Je savais qu'il était impossible que des femmes ne soient pas blessées.
Pourquoi ? Parce qu'historiquement, la deuxième vague est un phénomène qui se répète à chaque génocide : la première vague attaque, rend la population sans défense, puis la population civile se joint à elle pour commettre des crimes encore plus graves que ceux de la première vague.
Cela s'est produit en Ukraine pendant la Seconde Guerre mondiale, quand les nazis ont rendu les Juifs vulnérables, suivis par des citoyens ukrainiens qui les ont abusés. Cela s'est également produit le 7 octobre, lorsque les terroristes du Hamas ont laissé les infrastructures intactes, permettant ainsi à la population civile de venir piller."

Le Dr Naomi Halbert-Landau, âgée de 39 ans, est chercheuse et historienne du genre.
Elle s'intéresse depuis près d'une décennie à la violence sexuelle dans le contexte des génocides.
Sa thèse de doctorat sur ce sujet a récemment été publiée sous forme de livre, intitulé Dans les mâchoires du patriarcat (Carmel Publishing, juin 2024), où elle analyse les témoignages de survivants de violences sexuelles yézidis, tutsis rwandais, arméniens et bosniaques.

Dans ses recherches, elle tire des leçons importantes pour traiter les survivants des abus sexuels perpétrés par le Hamas et formule une sévère critique, non seulement contre les agresseurs, mais également contre l'ensemble du patriarcat.

Une position particulièrement frappante pour une femme religieuse vivant dans une colonie et portant un foulard. Issue d'une lignée d'intellectuels progressistes, sa mère, le professeur Tova Hartman, est chercheuse en genre et doyenne de la Faculté des sciences sociales et de spiritualité de l'Académie Ono.

Son père, le professeur Moshe Halbertal, est un éthicien et penseur respecté dans le monde ultra-orthodoxe. Son grand-père, le rabbin David Hartman, est un leader du courant libéral du judaïsme orthodoxe.

Dans votre mémoire de maîtrise, vous avez lu des témoignages de femmes juives concernant leurs luttes religieuses pendant la Shoah. Qu'en avez-vous retenu ?

"La loi juive permet à une femme mariée, qui a été violée, de retourner chez elle. Cependant, certains décisionnaires débattent de la définition du viol : est-ce uniquement en cas de contrainte physique, ou également lorsqu'une femme consent à des relations sexuelles pour sauver sa vie ? Ces distinctions sont cruciales dans les communautés religieuses, car une femme violée peut se retrouver exclue de la communauté et voir ses possibilités de mariage limitées.

Ce n'est pas quelque chose qu'on m'a appris. Je ne savais pas que lorsque des violences sexuelles sont perpétrées, la famille – les pères, les frères, les rabbins – peut devenir une source de terreur, car vous savez qu'ils décideront de votre sort : préféreront-ils vous tuer plutôt que de vous voir violée ? Ne vous ramèneront-ils pas à la maison ? J'ai soudain compris qu'il s'agissait d'une double blessure et d'un double traumatisme pour les femmes."

Pourquoi le viol est-il perçu comme une attaque contre les hommes dans les sociétés patriarcales ?

"Dans les sociétés dominées par les hommes, le viol des femmes est souvent interprété comme une atteinte à la dignité des hommes et à leur capacité à protéger leurs épouses, et non comme une atteinte aux femmes en tant que telles. Le code social exige l'ostracisme des femmes, ce qui conduit à la dislocation des familles. L'agresseur, en ciblant les femmes, entend détruire le tissu social de la communauté et la subvertir sexuellement. La violence sexuelle ne peut pas être interprétée uniquement comme un acte isolé, mais comme une arme stratégique visant à détruire une communauté."

L'attaque du Hamas diffère-t-elle des génocides que vous étudiez dans votre livre ?

"C'est vrai que les cultures et les motivations diffèrent. Au Rwanda, par exemple, le génocide est lié à l'occupation coloniale belge, et en Turquie, le pouvoir musulman s'est retourné contre une minorité chrétienne. Cependant, dans chaque cas, il y a une tentative de désintégration communautaire par le biais de la violence sexuelle : les hommes sont rendus impuissants et les femmes transformées en esclaves ou en matrices pour l'ennemi."

Comment les survivants israéliens sont-ils perçus par leur communauté après de tels événements ?

"Nous sommes encore au cœur de l'événement et nous ne savons pas encore vraiment comment la société réagira. Certes, Israël n'est pas l'Arménie d'il y a 100 ans, et les femmes violées par les terroristes du Hamas ne seront pas assassinées ici. Cependant, c'est un avertissement sérieux sur la manière dont les sociétés peuvent rapidement s'effondrer face à ces violences."

Que pouvons-nous faire pour mieux prendre en charge les survivants de violences sexuelles ?

"Il est essentiel de traiter les survivants avec humanité, de respecter leur rythme et de ne pas les réduire à des martyrs. Nous devons leur offrir tout le soutien nécessaire pour les aider à se reconstruire, et surtout, ne pas exiger d'eux des 'preuves en or' pour valider leur traumatisme."

Le parcours de Naomi Halbert-Landau est hors du commun. Née à Jérusalem et ayant grandi à Boston, elle vit aujourd'hui avec son partenaire Eliad, un cadre du secteur high-tech, et leurs cinq enfants à Tekoa. Titulaire d'une licence en danse, d'une maîtrise en études de genre et histoire, ainsi que d'un MBA, elle est chargée de cours au Collège académique Ono et vice-présidente de la start-up COB (Communities of Business). Son engagement va bien au-delà de la recherche : elle est également une militante active contre la violence des colons.

Comment votre communauté perçoit-elle votre engagement et vos écrits sur les mécanismes patriarcaux ?

"Je suis religieuse et il y a une grande complexité dans ces questions. Pourquoi me couvrir la tête ? Pourquoi envoyer mes filles dans des écoles religieuses qui enseignent la pudeur ? J'essaie de trouver un équilibre. Ma mère était une féministe radicale, et je ne suis pas prête à abandonner le judaïsme."

Dans votre livre, vous écrivez que la propagande patriarcale est aussi dangereuse que la propagande raciste. Pourquoi ?

"Tout comme le Rwanda a interdit de mentionner les termes Hutu ou Tutsi après le génocide, nous devons comprendre que lorsqu'on dit à une fille que sa virginité est sa plus grande valeur, on la condamne en cas d'agression sexuelle. Cela la tue socialement."

Halbert-Landau termine sur une note poignante : "Mon livre a été écrit avec le sang de mon cœur, et les témoignages de femmes survivantes m'ont donné la force de continuer. Nous devons faire en sorte que leurs histoires soient entendues, avec respect et dignité."

 

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