
Il n'y aura pas d'échange de prisonniers pour la famille d' Abraham Mengistu, ce juif éthiopien mentalement instable qui avait pénétré à Gaza en 2014.
Les parents de Abraham Mengistu sont sans nouvelles de leur fils depuis un an et demi, disparu après avoir pénétré dans la bande de Gaza.
Encadrés par le gouvernement israélien, les deux parents de Abraham Mengistu sont venus à Genève réclamer sa libération.
Pour les Israéliens, le jeune homme est aux mains de leur ennemi juré: le mouvement islamiste du Hamas. Ce cas étant resté secret jusque là, l'Etat hébreu décide aujourd'hui de le mettre au grand jour et adopte donc, une stratégie différente.
Ayaline et Agarnesh Mengistu, les parents, se meurent dans le silence. Ne parlant pas hébreu, c’est le frère du disparu, Gashao, qui raconte l’histoire de cette famille de dix enfants arrivée en Israël il y a 25 ans.
Abraham Mengistu reste fragile mentalement, ne s'étant jamais remis du décès brutal il y a quatre ans d’un autre membre de la fratrie.
Est-ce que cela expliquerait son geste ? En septembre 2014, Abraham Mengistu escalade la barrière de sécurité sur la plage entre Israël et Gaza. Comment est-ce possible? «La caméra ne l’a pas repéré, car il y avait un angle mort», justifie Orly Cohen-Geffen, chargée d’assister la famille pour le compte du ministère de la Défense.
Puis il a été aperçu de l’autre côté , discutant avec des pêcheurs de Gaza, c’est la dernière fois qu’il a été vu.

Abraham Mengistu
Gashao Menguistu est dans le regret : «Depuis le temps, j’ai cessé d’essayer de comprendre. Aucune personne saine d’esprit n’aurait fait cela un mois à peine après la dernière guerre à Gaza». Depuis, plus rien. «Le Hamas n’a jamais confirmé qu’il détenait Abraham Mengistu», dénonce Omer Caspi, l’adjoint de l’ambassadeur israélien auprès des Nations unies à Genève, et qui nous a traduit les propos de la famille Mengistu.
Des photos d'une mise en scène faite par le Hamas il y a quatre ou cinq mois ont été montrées par le diplomate. On y voit quatre fausses cellules. Sur l’une d’elles, a été affiché le nom d’Abraham Mengistu.
Le mouvement islamiste détiendrait aussi un Arabe israélien, un cas encore moins connu, et sur lequel nos interlocuteurs refusent de s’étendre. Les maîtres de Gaza refusent aussi de restituer les dépouilles de deux soldats tués lors de la guerre de l’été 2014.
"Mon frère n’a jamais été un soldat. Il a été dispensé de l’armée en raison de ses problèmes de santé. Le Hamas doit faire un geste humanitaire", souligne Gashao Mengistu.
Israël affirme n'avoir aucun contact direct avec le Hamas qu’il considère comme une organisation terroriste. «De toute manière il n’est pas question d’entrer dans des tractations politiques, argue Omer Caspi. Il doit être libéré immédiatement. Il n’y pas de place pour autre chose».
Un échange de prisonniers n'est pas prévu, comme celui qui avait permis la libération du caporal franco-israélien Gilad Shalit en 2011 après cinq ans de captivité.
A l’époque, Israël avait libéré mille détenus palestiniens, qui ont ensuite été en partie arrêtés à nouveau, sous des prétextes divers. «Les deux cas sont totalement différents, pointe Omer Caspi. L’un était un soldat, l’autre est un civil.»
Alors que Gilad Shalit bénéficiait du soutien de l'établissements israélien, les falachas, les juifs éthiopiens, eux, sont marginalisés.
Le long silence imposé sur le sort d’Abraham Mengistu avait alimenté les soupçons de racisme de la part du gouvernement de Benyamin Netanyahou, bien moins empressé de résoudre cette affaire. «Nous avons décidé de rendre public son cas en coopération avec le gouvernement. Nous étions alors loin d’imaginer que sa détention allait durer si longtemps», désamorce Goshoa Mengistu.
L’intransigeance du gouvernement israélien est partagée par la famille du détenu : «Il n’est pas question de nous engager dans le commerce d’êtres humains», estime son frère, faisant référence à un éventuel échange de prisonniers.
Israël appelle les organisations actives à Gaza à faire pression sur le Hamas «Celles qui aident à la reconstruction ou ont des programmes sur place ont un moyen de pression», insiste Omer Caspi. La famille Mengistu , a notamment, été reçue par le président du Comité international de la Croix-Rouge CICR, Peter Maurer.
Le CICR a accès aux prisons de Gaza mais reste sans aucune nouvelle d’Abraham Mengistu, considéré aujourd'hui, comme «disparu».
Nathalie ZADOK
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