Les financements publics attribués à des institutions jugées «déloyales» pourraient être suspendus par la ministre de la Culture , Miri Regev.
«Arrêtez vos conneries!» s'exclame ce dimanche la ministre israélienne de la Culture et des Sports,Miri Regev, en réponse à l'inquiétude suscitée par la plus controversée de ses initiatives.
La figure montante du Likoud s'est exprimée devant un parterre d'artistes et d'intellectuels rassemblé à l'occasion d'une conférence organisée par le quotidien de centre gauche Haaretz.
Son projet de loi, récemment approuvé, et moyennant quelques amendements par le conseiller juridique du gouvernement, prévoit que les subventions attribuées à des institutions culturelles jugées «déloyales» pourront à l'avenir être suspendues. Le Knesset doit à présent débattre sur ce texte.
Une large partie de l'assemblée a huée Miri Regev, la soupçonnant de vouloir museler les artistes opposés à la politique du gouvernement. Celle-ci 'est défendue de toute volonté de censure «Personne ne veut vous faire taire, a-t-elle affirmé, mais il y a une immense différence entre la critique impertinente et les appels au boycott ou à la délégitimation de l'Etat d'Israël.»
Son projet de loi vise en particulier les œuvres qui font l'apologie du terrorisme ou incitent à la haine et à la violence, mais également ceux qui contestent le caractère juif et démocratique de l'Etat d'Israël ou qui dégradent les symboles de la nation. «Un Etat sain doit délivrer un message clair sur ses valeurs ainsi que sur sa culture, et ne doit pas financer ceux qui travaillent à le renverser», conclu-t-elle.
Cette polémique s'inscrit dans le cadre de ce qu'un récent éditorial de Haaretz décrit comme une «guerre contre la culture» engagée par le gouvernement de Benjamin Nétanyahou.
Les relations entre les artistes classés à gauche et plusieurs ministres sont tendue. En effet, au cours des derniers mois , les accrochages se sont multipliés.
Deux théâtres ont vu leurs financements remis en cause : le premier parce qu'il refusait de produire un spectacle dans des colonies de Cisjordanie et le deuxième, parce qu'il envisageait de monter une pièce consacrée à la vie d'un prisonnier palestinien.
En décembre dernier, l'ouvrage de la romancière Dorit Rabinyan qui met en scène une histoire d'amour entre une Israélienne et un Palestinien a été retiré du programme scolaire au motif qu'il semblait mettre en péril «la séparation des identités». Les enseignants,eux n'ont pas approuvé ce retrait.
Depuis sa nomination au printemps 2015, Miri Regev revendique son souhait de remettre à plat l'aide apportée à création israélienne. Elle veut augmenter les subventions accordées aux institutions situées dans les villes situées à la périphérie du pays, ainsi qu'aux créateurs juifs orientaux. «La culture mizrahie est depuis trop longtemps marginalisée tandis que l'immense majorité des financements publics bénéficient aux grandes institutions contrôlées par les élites ashkénazes européennes», déplore Orly Noy, une activiste engagée dans la mise en valeur de la culture orientale, qui conteste la politique du gouvernement mais défend la nécessité d'un rééquilibrage.
La ministre de la Culture a déclenché un petit tollé en novembre dernier, en annonçant vouloir contraindre la radio militaire à diffuser davantage de musique israélienne, en mettant l'accent sur le registre oriental, au nom de la «justice culturelle». Ses contempteurs l'accusent d'avoir voulu ainsi flatter à peu de frais une communauté séfarade qui vote traditionnellement pour le Likoud.
«Il y a sans doute du vrai dans cette interprétation, mais les cercles ashkénaze qui dominent la scène culturelle depuis des décennies ne devraient pas s'en contenter», nuance Orly Noy, qui pointe la responsabilité de ces élites dans leur rejet par une partie de la société israélienne.
l'ONG d'extrême droite Im Tirtzu , symbole de la tension croissante entre ces cercles culturels et la droite nationaliste, a récemment assimilé les écrivains David Grossman et Amos Oz, ainsi que plusieurs auteurs, dramaturges et musiciens classés à gauche, à des «taupes» résolues à subvertir l'Etat.
Les auteurs de la campagne ont du présenter leurs excuses, contraint par la levée de bouclier, générale et immédiate.
Dimanche soir, comme dans un écho scabreux à leurs attaques, l'artiste Ariel Bronz s'est enfoncé un drapeau israélien dans les fesses sur l'estrade où Miri Regev venait tout juste de prendre la parole. Les organisateurs de la conférence ont condamné cette provocation. La police, dans la foulée, a ouvert une enquête pour «usage non approprié d'un des symboles du pays».
Nathalie ZADOK
Je ne comprends pas que votre magazine utilise le terme » colonies » alors qu’il s’agit d’implantations ou territoires disputés…!
» Deux théâtres ont vu leurs financements remis en cause : le premier parce qu’il refusait de produire un spectacle dans des colonies de Cisjordanie et le deuxième, …. »