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Erreur judiciaire : André Kaas innocenté et indemnisé
Le 11/12/07, La justice a finalement reconnu son erreur dans le procès d’André Kaas qui a finalement été innocenté. Nous nous souvenons de cette déclaration d’Andrée Kaas en 2005 : « On a tué ma femme, détruit ma famille, jeté 3 ans en prison, et le meurtrier de ma femme court toujours...ce qu’ils ont démoli, j’avais mis 20 ans à le construire, je me battrai jusqu’au bout pour qu’il y ait réparation. »
Le 5 avril 1992, Sylviane Kaas est assassinée alors que son mari et leurs enfants sont sortis au cinéma. Sur la base d’un dénonciation douteuse, André Kaas est jeté en prison un an et demi après. Un non-lieu général est prononcé le 26 mars 2004. L’assassin n’a pas été retrouvé, alors que des pistes, connues peu de temps après le meurtre mais non ou mal exploitées, auraient peut-être pu permettre son arrestation. Dans la foulée, l’innocent André Kaas est arrêté et détenu à tort pendant plus de trois ans, entre 1993 et 1996. Son innocence vient d’être reconnue ce lundi 10 décembre et il se voit attribuer 103.000 euros de dommages et intérêts par la Commission nationale d’indemnisation de la détention provisoire.
Le dimanche 5 avril 1992, André Kaas et ses 4 enfants, qui habitent une superbe maison en banlieue rouennaise vont au cinéma. Sylviane, la mère, reste au domicile familial.. C’est au retour de la séance que tout bascule. Sylviane gît sur le sol, morte, tuée par les balles d’une carabine qu’on a retournée contre elle. Des bijoux et sa voiture ont disparu. Le cauchemar démarre. La police pense à un crime crapuleux et jette 2 suspects en prison avant de les relâcher. L’enquête n’avance pas. Les mois passent, et les enquêteurs vont s’intéresser à André Kaas, une personnalité hors du commun, qui dénote dans la bonne société rouennaise. Sur les révélations d’un dealer arrêté à la frontière lilloise, ils vont se forger la conviction -que partagera ensuite le juge d’instruction - que c’est André Kaas qui a commandité le meurtre de son épouse.
Celui-ci est homme d’affaire flamboyant, ancien champion de judo, qui a fait fortune en vendant des maisons individuelles. Il a la passion des femmes et multiplie les conquêtes, tandis que son épouse collectionne les amants. « on se disait tout, il n’y avait pas de mensonge entre nous ». Ils sont un couple libre. « J’avais, explique-t-il, une double vie, d’abord celle du grand bourgeois qui menait grand train –nous avions une villa somptueuse, des employés de maison- et celle du champion de judo qui avait un club dans la banlieue rouennaise où j’entraînais les jeunes beurs des cités. J’aimais être au confluent de ces 2 mondes, celui des affaires et celui du sport » ajoute-t-il encore. André Kaas est placé en garde à vue. Puis en prison. « Dans cette affaire, s’emporte-t-il il n’y a pas d’aveu, pas de mobile, pas de preuve, pas de préméditation et je prends 19 mois de prison ! Alors pour moi ce n’est que de l’antisémitisme ! » L’enquête a été bâclée. « L’incompétence du juge » est pour lui flagrante et déterminante dans le déroulement de l’affaire.
André Kaas est d’autant plus catégorique que l’année dernière, il a retrouvé un « pv de gendarmerie » rédigé 5 jours après le meurtre de sa femme –le 10 avril 1992. Ce pv énonce les pistes en présence à ce moment de l’enquête .Il y en a 3. La 3e évoque « une personne vendant des tableaux (qui) s’est présentée » au domicile des Kaas, « elle s‘occupe de réinsertion de personnes sortant de maison d’arrêt ». Il est écrit : « Cette piste n’a pas été explorée ». C’est hallucinant que l’on soit passé à côté de ça… ». Et puis selon Monsieur Kaas, une autre chose a joué contre lui :« le fait que je ne vive pas comme tout le monde ; trop d’argent, trop de femmes, une vie différente. J’avais certainement tout pour attirer la haine et puis certains voulaient se faire un gros juif » commente-t-il aujourd’hui. Le mari de Sylviane Kaas passe alors, dans un premier temps,19 mois en prison à Rouen. Au terme de cette période, le juge enfin convaincu de son innocence le libère. Mais un mois plus tard, il est renvoyé derrière les barreaux par la présidente de la chambre d’accusation et contre l’avis des parties civiles. Il va refaire 16 mois.
En tout ce sera 3 ans pour un crime dont il est soupçonné à tort. 3 ans pour rien. Il sortira le 16 octobre 1996. le non-lieu ne viendra que le 5 avril 2004 –exactement 12 ans après la mort de sa femme.
Entre temps, le nouveau procureur de la République de Rouen Joseph Schmidt a repris l’affaire. Et est tombé sur la fameuse piste « non explorée » mentionnée dans le pv de gendarmerie, celle du vendeur de tableau à domicile récemment sorti de prison. « Cet individu fait du repérage chez moi 15 jours avant le meurtre et vend un tableau à une de mes employées de maison, et quand on l’interroge en 2000 sur le dossier Kaas, on s’aperçoit que le portrait robot -établi 8 ans plus tôt au lendemain du meurtre de ma femme- lui ressemble trait pour trait !! »...« Ainsi, reprend André Kaas, avec toujours autant de détermination « nous estimons qu’aujourd’hui il y a assez d’éléments pour envoyer cet homme devant une Cour d’assises. Mais il est toujours en liberté et une femme peut mourir à cause de lui…je veux que l’instruction reprenne et que mes enfants puissent faire le deuil de leur mère ! D’un point de vue judiciaire : on se trouve face à une erreur monumentale ! » et ce père de famille d’enchaîner « je voudrais également dire que les conséquences humaines de cette histoire sont tragiques ».
Au moment de son interpellation, sa fille aînée Nathalie a 21 ans et vient de passer sa maîtrise de Droit, son fils Julien a 14 ans, Jérôme en a 12, et le petit dernier 4. « Les gosses ont été abandonnés et recueillis par ma fille. On habitait dans une villa somptueuse, et dans les semaines et les mois qui ont suivi mon incarcération j’ai dû brader tout mon patrimoine. Mes enfants ont été contraints d’arrêter leurs études pour subvenir à leurs besoins ».
Retrouver l’assassin mais aussi obtenir réparation. Voilà les combats d’André Kaas maintenant innocenté du meurtre de sa femme. Il réclame réparation par rapport au préjudice économique subi. « Ca a été une épreuve difficile de voir tout ce que j’ai bâti en 20 ans, détruit. Je veux avoir les mêmes liquidités qu’avant et c’est d’ailleurs ce que prévoit la Loi de 2001 ». Aujourd’hui la justice ne prend pas en compte les conclusions de l’expertise financière réalisée aux frais de Kaas et qui chiffrent les pertes de la famille à 1,7 million d’euros (pour la détention). « J’irai au bout. Je suis têtu, ça durera ce que ça durera, je ne lâcherai pas le Garde des Sceaux. Je suis prêt à lancer une campagne à Lyon où il veut être maire, en racontant aux Lyonnais ce qui s’est passé pour que les gens voient qu’il ne s’intéresse pas aux victimes. »
« Vous savez, ajoute-t-il encore en guise de conclusion, on ne peut pas se remettre d’un tel drame. Par contre tout ce qui ne vous tue pas, vous rend plus fort ». Et assurément André Kaas, 13 ans après le meurtre de sa femme, semble plus déterminé que jamais à combattre.
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