Le Travail des journalistes sous contrôle palestinien

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Le Travail des journalistes sous contrôle palestinien,
titre original de l'article:

 

 

DATELINE JERUSALEM: SEE HOW THEY RUN.
JOURNALISTS UNDER PRESSURE?

 

par Judy Lash Balint
traduction Yona Dureau

L'autorité palestinienne n'aime pas les journalistes. Le comité indépendant pour la protection des journalistes qui recense les attaques contre la presse et prône la liberté de la presse dans le monde rapporte: "Depuis maintenant près de sept ans que l'Autorité Palestinienne a pris le contrôle de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, le président Yasser Arafat et sa sécurité à multiples ramifications ont muselé les critiques de la presse locale par le biais d'arrestations arbitraires, de menaces, de mauvais traitements physiques, et la censure des communiqués de presse.
Avec les années, le régime d'Arafat est parvenu à contraindre la plupart des journalistes palestiniens à l'auto-censure par la terreur."
Il n'y a aucune raison de penser que les correspondants de presse étrangers, qui étaient traqués de façon notoire à Beirout il y a vingt ans par l'OLP, futur A.P., ne soient pas contraints d'exercer le même type d'auto-censure aujourd'hui, et de faire un compromis avec la couverture objective et juste de la situation actuelle.
Pourtant, le verrou de fermeture sur la vérité le plus efficace, aujourd'hui, est constitué par le groupe des journalistes eux-mêmes. L'idéologie homogénéisée du corps de presse fait que la pensée indépendante continue à exiger du journaliste un courage et une persévérance tout à fait remarquable pour ne pas céder à cette pression.
Dans une partie du monde où les media ont par beaucoup d'aspects donné sa forme au conflit, la combinaison de terreur et de verrouillage de la pensée comme de l'information sur les protagonistes ne présage pas favorablement d'une solution.


Ramallah: Les choses ne seront plus jamais les mêmes

Le lynchage de deux Israëliens soldats de réserve à Ramallah le 12 Octobre 2000, et son tournage fut un tournant dans la couverture médiatique de la seconde intifada.
Jusque-là la plupart des journalistes occidentaux étaient libres de voyager où ils le souhaitaient dans les territoires palestiniens.
Le reporter de la télévision Sky TV News, Chris Roberts, déclare que lorsque la violence éclata en septembre, l'Autorité Palestinienne accueillit les reporters les bras ouverts: "Ils voulaient que l'on montre comment des enfants de 12 ans se faisaient tuer," explique-t-il. Mais après le lynchage, et après que les agents de l'Autorité Palestinienne aient fait de leur mieux pour confisquer et détruire le film de l'événement macabre, et que les forces israëliennes aient utilisé les images pour retrouver et arrêter les participants au lynchage, les Palestiniens ont souvent soulagé leur hostilité vis-à-vis des Américains en harcelant et en cherchant à intimider les correspondants occidentaux. "Dans la phase post-Ramallah, alors que toute la bonne volonté a disparu, je fais beaucoup plus attention aux endroits où je mets les pieds," déclare Roberts.

Ahmed Budeiri, un correspondant free-lance arabe brillant de ABC Télévision, âgé d'une vingtaine d'années, reconnait que Ramallah est "vraiment devenu dangereux pour les étrangers après le lynchage."
Selon des informations données par les intéressés eux-mêmes, une équipe de télévision polonaise s'est vu encerclée par les forces de sécurité palestiniennes, battue, et leur film du lynchage volé. Mais la plupart des cameramen de l'équipe étaient palestiniens. Si l'on considère la terreur infligée aux journalistes palestiniens, il n'est pas étonnant que presque tous, à l'exception d'un seul, travaillant pour la chaîne d'informations arabe Al-Jazeera, et un cameraman de la chaîne italienne RTI, aient obligeament donné leur film aux agents de l'Autorité Palestinienne.
Nasser Atta, producteur palestinien travaillant avec le réseau d'informations ABC, se trouvait à l'extérieur du bureau de police de Ramallah lorsque la scène sanglante éclata. Interviewé le lendemain dans l'émission du soir d'ABC "Nightline", il déclara à l'invité Ted Koppel que des personnes de la foule l'avaient assailli pour l'empêcher de filmer. "J'ai vu des jeunes prendre d'assaut mon équipe pour l'arrêter de filmer. Mon cameraman a été battu." déclara Atta.

Un journaliste britannique, Marc Seager, écrivit dans le Sunday Telegraph, journal de Londres (22 Octobre) : "J'étais en train de faire la composition de ma photo, lorsque je fus frappé d'un coup de poing au visage par un Palestinien. Un autre Palestinien me désigna du doigt en criant 'no picture, no pictures, ' (pas de photo, pas de photo), et un autre type me frappa au visage en disant, "donne-moi ton film". Un quatrième type m'arracha mon appareil-photo et l'écrasa par terre."
La plupart des reporters reconnaissent que l'Autorité palestinienne a ouvertement confisqué les films et les photos du lynchage. Mais quelques uns, comme le journaliste Neil Macdonald, de CBC, qui ont interviewé le chef de la sécurité palestinienne, Jibril Rajoub, se sont vu répondre qu'aucun film n'avait été confisqué.
D'autres, comme Bill Orme, du New York Times, en sont arrivé à leur propre conclusion qu'alors que la foule qui a attaqué les journalistes comprenait des policiers palestiniens, "personne n'a suggéré qu'il s'agissait d'une politique de l'Autorité Palestinienne. Ce n'était pas un ordre officiel."

Le film unique qui échappa aux griffes de la police de l'Autorité Palestinienne, parvint aux écrans de télévision autour du monde de la façon la moins orthodoxe. Selon Gideon Meir, directeur général des affaires publiques au Ministère des Affaires étrangères israëliennes, l'ambassade israëlienne à Rome a réussi à obtenir et protéger la vidéo de la chaîne indépendante de télévision italienne RTI, et moins de six heures après l'évènement macabre, les images passaient à Jérusalem. Les Italiens les ont diffusé sans exiger de paiement, déclara Meïr.

Le TV Newsweb, un site web pour les producteurs de télévision et les correspondants, a rapporté la retransmission du film d'une manière quelque peu différente : "Deux cassettes vidéo disparaissent de la circulation et réapparaissent à Jérusalem une heure plus tard. La cassette de Al-Jazeera fut proposée à la vente pour la somme de $1,000 américains par minute, mais elle était filmée de loin, avec des tremblements, et manquait d'impact. La cassette RTI était très graphique.
L'éditeur de la cassette RTI, qui se trouvait sur les lieux du drame, témoigna à une conférence de presse de Jérusalem organisée par le Ministère des Affaires étrangères israëlien et par le Government Press Office. RTI finit par mettre la cassette à la disposition des agences de presse en Italie, et les images macabres firent la une de la plupart des journeaux télévisés du soir."

Pendant ce temps, le vétéran des reporters italiens, M. Riccardo Cristiano, venait juste de sortir de l'hôpital où il avait passé plus d'une semaine pour se remettre des coups et blessures qu'il avait reçu, lorsqu'il fut battu à Yafo, alors qu'il couvrait les émeutes des Arabes israëliens. Cristiano eut le nez cassé, les pomettes des joues éclatées, et il perdit presque l'usage de son oeil droit.

Le reporter de la chaîne de télévision du gouvernement italien repartit travailler le jour qui suivit le lynchage. Selon Macdonald, de CBC, Cristiano, "un type très pacifique", était traumatisé par l'attaque de Jaffa. Lorsqu'il reçut des menaces de mort après les événements de Ramallah, probablement émanant de Palestiniens qui l'avaient à tord associé au tournage du lynchage," déclara Macdonald.
Cristiano écrivit une lettre en anglais à un ami journaliste palestinien du journal Al Hayat Al Jedida assurant à son collègue que sa chaîne n'était pour rien dans le reportage et qu'il ne violerait jamais l'éthique journalistique en transmettant un film à une ambassade ou à un bureau gouvernemental.
Le lundi 16 Octobre 2000, une version de cette lettre parut en arabe sur la première page des journeaux. Cristiano était privé de son visa israëlien de journaliste et était rappellé à Rome.
Le correspondant RTI fut évacué secrètement du pays pour sa propre sécurité après que les forces militaires israëliennes aient utilisé des images figées de son film pour mettre la main sur six des coupables de raids secrets.
Je partis en décembre dernier pour Rome pour rencontrer Riccardo Cristiano . Le grand Cristiano moustachu grisonnant et à la voix pondérée reconnait que son point de vue est de gauche, mais dans sa quête pour la justice en faveur de ceux qu'il considère comme opprimés, il suit les traces de son père, le fameux artiste italien Paolo Cristiano.
Cristiano père était membre de la résistance italienne, et passa trois ans dans les camps de concentration nazi. Il pesait à peine 40 kilos quand il rentra chez lui.
Riccardo me confia que son père était mortifié d'entendre des personnes accuser son fils d'anti-sémitisme. "La seule chose qu'il avait voulu faire lorsqu'il m'avait rendu visite en Israël était de visiter Yad Vashem", dit calmement Riccardo. récemment, Cristiano a eu une rencontre avec le chef du conseil juif de Venise pour expliquer ses actions et obtenir son soutien.
La lettre Al Hayat est devenur une affaire politique en Italie, parce que Cristiano travaillait pour la chaîne du gouvernement, et que sa lettre fut perçue comme ayant mis en danger la vie d'un reporter d'une chaîne indépendante dirigée par le Premier Ministre Silvio Berlusconi, qui appartient à l'opposition du centre droite.
Le parti de Berlusconi critique le soutien des Palestiniens par les media sponsorisés par le gouvernement italien.
Au cours de plusieurs interviews, Cristiano fut soucieux de ne parler que de ce qui était arrivé dans sa vie lors des mois en question, et d'aviter de parler de cette lettre objet de polémique.
Bien qu'il n'ai toujours pas de travail, il est encore techniquement employé par la RAI en attendant l'audience d'un conseil disciplinaire qui sera déterminante pour son futur de journaliste. Sa lettre d'Octobre a été publiée sans autorisation, et il ne peut plus se payer le luxe d'être accusé d'avoir accordé une interview sans autorisation au sujet de ses justifications pour ses actions.

De façon significative, Bill Orme, en tant que membre du bureau de la FPA (Foreign Press Association) se rappelle que dans une conversation téléphonique avec Cristiano le jour où la lettre fut publiée dans le Al Hayat, le reporter italien authentifia et même en défendit le contenu, en déclarant au FPA qu'il était soucieux de la sécurité de son équipe.

Les difficultés de Cristiano mettent en lumière la fraternité jouranlistique qui lie les journalistes couvrant le Moyen Orient. Comme beaucoup de reporters qui furent battus par les Palestiniens ces derniers mois, Cristiano feln'éprouve aucune rage contre la violence des Palestiniens. De même qu'il n'a pas de grande attente vis-à-vis de l'Autorité Palestinienne.
Il rapporte comment son équipe était en train de filmer un garde du corps du ministre des Affaires de Jérusalem palestinien, Faisal Husseini , qui gifla quelqu'un à une garden party qui avait lieu à Orient House, le Q.G. de l'Autorité palestinienne à Jérusalem. Un autre garde du corps est intervenu et a détruit le film. Cristiano, chef du bureau délégué, porta plainte. Le jour suivant, Husseini envoya ses excuses et tout fut oublié.
Alors que Cristiano éprouve visiblement de la sympathie pour la cause palestinienne, il n'est pas "anti-israëlien. Il parle de son intérêt particulier pour les Arméniens, et considère à la fois les Israèliens et les Palestiniens comme des "nations traumatisées".

Mais en attendant que son nom soit blanchi, Cristiano continue à être un homme abattu. "Mes amis pense que je suis de cette humeur à cause du fait que j'ai perdu mon travail à Jérusalem," dit-il tristement, "mais en fait j'ai perdu mon honneur et ma crédibilité et pour ma descendance."

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